BARRAGES NATURELS DUS AUX GLISSEMENTS DE TERRAIN

partie 1 : Les Alpes

DESCRIPTION DES EVENEMENTS

Toutes ces données sont extraites de l'ouvrage de Fr. MONTANDON "Chronologie des grands éboulements alpins du début de l'ère chrétienne à nos jours", publié en 1933. Seuls ont été retenus les éboulements rocheux ou les glissements de grande ampleur qui ont entraîné la formation de barrages en fond de vallée, suivi de montée des eaux, avec ou sans rupture de ces barrages.

Les noms de lieux précédés d'un astérisque (*) correspondent à des formations de barrages suivies d'une rupture brutale.

Ce chapitre a été développé en raison des possibilités de corrélations qui peuvent être établies entre ces cas anciens, et des cas potentiels actuels localisés en Europe, et plus particulièrement dans le Massif Alpin. En effet, la comparaison de sites alpins avec des sites himalayens ou andins par exemple, semble plus discutable en raison des différences notables de proportions entre les différents phénomènes.

Deux écroulements récents ont été ajoutés à cette liste : Val Pola et Randa.

LES FIZ (Haute Savoie - I° siècle de n.e.?)

- Au début de l'ère chrétienne, peut-être, éboulement de l'arête des Fiz, au Nord de Servoz, avec formation d'un barrage sur l'Arve.
- Formation d'un lac à la place de l'actuelle plaine de Servoz.
- Ecoulement des eaux durant "un certain temps", par la brèche de la Rateria, le long de la combe du Châtelard.
- La nappe d'eau qui a tenu plus de mille ans, s'est probablement vidée au cours du XIII° siècle.

(*) LUC-EN-DIOIS (Drome - I° ou II° siècle de n.e.?)

- Eboulement au Puey de Luc, avec formation d'un barrage sur la Drome.
- L'ancienne ville gallo-romaine de Luc aurait été engloutie par la montée des eaux (d'après une tradition locale).
- Nouvel éboulement sur le même site en 1442.

(*) BOURG-SAINT-MAURICE (Savoie - 163)

- Eboulement, en 163, des couches triasiques du massif situé au Nord de Bourg-Saint-Maurice, entraînant des coulées dans l'Arbonne, affluent rive droite de l'Isère.
- Formation d'un barrage sur l'Isère.
- Formation d'un lac dans la plaine en amont du cône de l'Arbonne.
- Rupture du barrage. La débâcle ravage la vallée jusqu'à plus de 25km à l'aval.

REISSKOFEL (Autriche - 328)

- Eboulement du Reisskofel en 328.
- Embâcle du Gail avec formation d'un lac qui a contraint les habitants de la localité romaine de Risa à abandonner leur village.
- Le lac correspond actuellement à un secteur très marécageux de la vallée.

FADALTO (Vénétie, Italie - 365)

- L'embâcle de la vallée N/S provient de l'éboulement d'un flanc du Monte Costa, qui totalise un volume de l'ordre de 90 à 100 millions de m3.
- Ce barrage semble avoir deux origines distinctes : un premier éboulement qui se serait produit à la fin des dernières glaciations, et un second éboulement, en 365,    qui serait d'origine sismique.
- Le lac, consécutif à l'éboulement de 365, a ensuite trouvé un exutoire vers le NW. Cet exutoire est toujours en activité.

(*) DENT DU MIDI (Valais, Suisse - 563)

- L'éboulement du versant Est de la Dent du Midi (altitude 2000 à 2600m), en 563, rase un village, un fort, et forme un barrage haut de 200m qui barre le Rhône.
- La rupture brutale du barrage provoqua une vague déferlante qui se propagea jusqu'à Genève, via le lac Léman.

MARCO (Trentin, Italie - 883)

- Eboulement du versant NW de la Zugna Torta en 883.
- Les éboulis qui totalisent 120 millions de m3, et qui s'étendent sur 350ha, ont anéanti une localité.
- L'embâcle de l'Adige provoqua un manque d'eau pour la ville de Vérone durant "un certain temps".

VIGAUN (Autriche - Moyen Age)

- Eboulement d'un pan de la Raspenhöhe, à l'Ouest du village de Vigaun.
- Embâcle de la Salzach par 4 millions de m3.
- La rivière a ensuite érodé le barrage. Elle coule encore actuellement entre les éboulis et le pied de la montagne.

ROCCA TOVO (Piémont, Italie - Moyen Age)

- Eboulement survenu sur le versant rive droite du Val d'Ala, et qui a enseveli un village.
- Les éboulis ont encombré le thalweg sur une longueur de 2km, et créé un barrage avec formation d'un lac qui s'est comblé au fil des ans, par l'apport des torrents.

MONT ROSSANE (Savoie - Début du XI° siècle)

- Eboulement d'un volume de l'ordre de 3 millions de m3, survenu sur le versant NE du Mont Rossane.
- Le dépôt long de 900 à 1000m,large de 300 à 450m et haut de 20m, a embâclé le Chéran.
- Un village a été détruit directement par l'éboulement, et un lac s'est formé dans la région des villages de Compote et d'Ecole.

(*) ROQUEBILLIERE (Alpes-Maritimes - XII° siècle?)

- Eboulement(s) survenu(s) de la colline de Saint-Julien
- Embâcle de la Gordolasque.
- Le village de Roquebillière, déjà déplacé une première fois pour cause d'inondation, est à nouveau enseveli sous les eaux du lac engendré par l'éboulement.

MONTE PERON (Vénétie, Italie - 3 Janvier? 1116)

- Eboulement survenu probablement à l'occasion du séisme du 3 Janvier 1116, et provenant du Monte Peron.
- Eboulis répartis sur 6km2, et totalisant 200 millions de m3. Les blocs les plus gros ont 10m de côté.
- Formation d'un barrage haut de 50m minimum, surmontant des dépôts glaciaires plus anciens.
- Deux villages ont été ensevelis directement sous les éboulis.
- Formation d'un lac de retenue qui s'est vidé graduellement par érosion du dépôt d'éboulement.

(*) PETITE VAUDAINE (Isère - 1191)

- L'éboulement détaché de la Petite Vaudaine s'est propagé par le ravin du même nom, et a enclavé la Romanche à l'amont de Livet, au lieu dit l'Aveyna.
- Le lac formé (lac de St. Laurent), avait une profondeur de 15m pour une longueur de 15km. Le Bourg d'Oisans fut totalement submergé.
- Le 14 Septembre 1219 (28 ans après l'éboulement), le barrage cède, la débâcle emporte le village de Séchilienne, inonde Vizille, et barre l'Isère qui inonde à son    tour la moitié de Grenoble.
- Cette catastrophe qui coûta la vie à plusieurs milliers de personnes, fut ressentie jusque sur les bords de la Méditerranée.

AYER (Valais, Suisse - XIII° siècle)

- Eboulement survenu sur la rive droite de la Navizance.
- Destruction totale d'un village et formation d'un barrage.
- Le lac s'est comblé graduellement, et il ne subsiste actuellement que des terrasses en amont de l'éboulement.


VAL ALBA (Vénétie, Italie - XVIII° siècle)

- Premier éboulement survenu sur ce site, et qui a détruit le village situé dans le vallon de l'Alba.
- Six siècles plus tard (20 Octobre 1896), nouvel éboulement qui forme un barrage avec lac de retenue.
- En 1900, le lac se vide. Aucune donnée sur l'origine et la vitesse du phénomène

. CURALLE (Valais, Suisse - XVIII° ou XIV° siècle)

- Entre 1200 et 1400, éboulement (peut-être en plusieurs fois) du versant SW de la Pierre Avoire.
- Il ne subsiste actuellement qu'un cône de 240m de hauteur, entaillé par le torrent, et les traces d'au moins un lac qui serait remonté jusqu'à 2km en arrière.
- Aucune donnée sur la vidange du lac.

(*) DOBRATSCH (Carinthie, Autriche - 25 Janvier 1348)

- Eboulement survenu le 25 Janvier 1348, à l'occasion d'un séisme qui causa la mort de plus de 1000 personnes.
- Les premiers éboulis préhistoriques de 535 million de m3 qui occupaient le font de vallée, ont été rehaussés sur 700ha par 35 nouveaux millions de m3.
- La rivière du Gail a été embâclée durant quelques jours, formant un lac modeste. La rupture brutale du barrage a fini de détruire les 17 villages situés à l'aval, déjà    touchés par le séisme.

(*) GSPELLERBERG (Haute-Adige, Italie - 1401)

- L'éboulement enclava la Passeria, et forma un lac profond de 55m.
- Après que l'exutoire eut fonctionné normalement pendant 18 années, le barrage se rompit, et la débâcle ravagea la vallée de la Passeria. Les dommages    s'étendirent jusqu'à Bolzano sur l'Adige.
- Des désastres semblables se reproduisirent encore cinq fois (1503, 1512, 1572, 1721 et 1772), et le lac reçut le nom de "Kummersee" (Lac des Soucis).

LUC-EN-DIOIS (Drôme - 1442)

- L'éboulement provenant du versant Sud du Puey de Luc s'est divisé en deux branches, et a barré la Drôme en deux endroits différents, en amont de Luc en Diois.
- Derrière le barrage aval s'est formé un lac de 6ha, et derrière le barrage amont, un lac plus important, long de 8km.
- Certains blocs de l'éboulis ont une hauteur de 20m.
- Les deux lacs ont été asséchés au XIX° siècle.

(*) SALINS (Savoie - 1450 ou 1451)

- Eboulement dans le versant occidental de la gorge du Doron, d'un volume estimé à 70 000m3.
- Destruction du village de Salins.
- Embâcle du Doron, suivie après un délai non défini, par une rupture du barrage qui aurait été à l'origine d'une des très grandes inondations dont a souffert Moutiers    au Moyen-Age.

PETITE VAUDAINE (Isère - 4 Août 1465)

- Nouvel éboulement à la Petite Vaudaine, consécutif à un orage.
- Formation d'un barrage sur la Romanche, sur 40m de longueur et 15 à 18m de hauteur.
  Remontée du niveau du lac de St-Laurent avec inondation de toute la plaine de Bourg d'Oisans.

LES FIZ (Haute-Savoie - Fin Février 1471)

- Eboulement au Col du Dérochoir, dans la chaîne des Fiz.
- Les éboulis qui couvrent 700ha, sont remontés très haut dans le versant d'en face, et ont embâclé l'Arve.
- L'inondation de Servoz a été évitée grâce à des travaux de dégagement des éboulis destinés à frayer un passage à la rivière.

VELBER TAL (Tyrol, Autriche - 1495)

- Eboulement provenant du Tauern Kogl, consécutif à un séisme.
- Embâcle du Velber Bach avec formation d'un lac qui existe encore actuellement, le Hintersee.
- De nombreux autre éboulements ont eu lieu la même année, dans la même vallée, suite à l'importance du séisme.

(*) PIZZO MAGNO (Tessin, Italie - 30 Septembre 1513)

- Eboulement sur le versant Ouest du Pizzo Magno, de 15 à 20 millions de m3, avec des blocs jusqu'à 100m3.
- Ces éboulis s'ajoutent aux cônes qui barrent déjà la vallée, pour totaliser un volume de 80 à 100 millions de m3.
- Embâcle totale du Val Blénio, et formation d'un lac long de 5km pour une profondeur de 50m maximum.
- 20 mois plus tard, le 20 Mai 1515, rupture brutale du barrage.
- La vague causa des dégâts jusqu'au Lac Majeur, 32km à l'aval.
- On compta 600 morts et 400 habitations détruites.

(*) GRANDE SCHLIEREN (Unterwald, Suisse - autour de 1565)

- Barrage de la vallée de la Grande Schlieren par un éboulement.
- Destruction du village de Schoenried lors de la rupture de l'obstacle.

GRAND SAINT-BERNARD (Valais, Suisse - 1578)

- Eboulement rocheux au Nord du Col du Grand Saint-Bernard.
- Barrage de la vallée.

(*) TSCHAPPINA (Grisons, Suisse - 15 Août 1585)

- Eboulement provenant du torrent de Thusis.
- Barrage du Rhin postérieur, et dévastation de toute la vallée du Domleschg.

(*) GLÄRNISCH (Glaris, Suisse - 3 Juillet 1594)

- Suite à des séismes répétés, un premier éboulement se produisit le 11 Novembre 1593, sur le flanc Nord du Vorder-Glärnisch.
- Récidive 8 mois plus tard, le 3 Juillet 1594, avec formation d'un barrage puis d'un lac de retenue.
- Le 12 Juillet, rupture du barrage avec importants dégâts dans la ville de Glaris.

(*) TETE-NOIRE (Haute-Savoie - 21 Février 1602)

- Eboulement provenant de la Tête-Noire, avec propagation des éboulis par le lit du Nant des Pères.
- Destruction directe d'un village et de trois hameaux.
- Formation d'un barrage sur le Giffre.
- Rupture du barrage à une date non précisée, avec dévastation de la vallée jusqu'au verrou de Tines.

(*) PETITE VAUDAINE (Isère - 7 Août 1612)

- Nouvel éboulement de la Petite Vaudaine.
- Nouvel embâcle de la Romanche.
- Nouvelle formation du Lac de St-Laurent.
- Malgré une brèche ouverte par 40 ouvriers, la rupture du barrage se produit brutalement 4 jours plus tard, le 11 Août, emportant le pont de Gavet.

PIURO (Val Bregaglia, Italie - 4 Septembre 1618)

- Fissuration du Monte Conto signalée 10 ans avant l'éboulement.
- Eboulement de 3 à 4 millions de m3 provenant du Monte Conto, s'étant produit en deux phases distinctes peu espacées (quelques heures), et consécutif à 10 jours   de pluie ininterrompus.
- Destruction totale de la ville de Piuro lors de la seconde phase, avec 1 200 victimes.
- Embâcle du cours de la Maira par un barrage haut de 18 à 30m, mais les eaux trouvent une issue au bout de 2 heures, et s'écoulent sans dommage.

SALVAN (Valais, Suisse - 31 Janvier 1635)

- Eboulement causant d'importants dégâts sur la commune de Salvan.
- Formation d'un petit lac encore existant.

(*) LULLIN (Haute-Savoie - 11 Avril 1635)

- Eboulement dans le flanc Est du Mont Forchet.
- Embâcle du torrent du Grand-Creux.
- Débâcle suivie de dégâts jusqu'au village de Lullin, 1km à l'aval.
- 64 victimes et 22 bâtiments détruits.

>DENT DU MIDI (Valais, Suisse - 11 Octobre 1635)

- Eboulement provenant de la Dent de Novierroz, et alimentant le cône du Bois-Noir.
- L'année suivante, les 12 Mai et 25 Juin, nouvelles descentes de blocs et de boues qui embâclèrent le Rhône durant 1/2 heure.
- Une lac se forma cependant à l'amont.

ANTRONA PIANA (Domo d'Ossola, Italie - 27 Juillet 1642)

- Eboulement d'une partie de la Cima di Pozzuoli (12 millions de m3).
- Destruction du village d'Antrona Piana, (95 victimes).
- Barrage de la vallée par les éboulis sur une hauteur de 50m.
- Le lac formé à l'arrière du barrage est encore en place actuellement.

(*) PETITE VAUDAINE (Isère - 18 Juillet 1666)

- Nouvel éboulement de la Petite Vaudaine.
- Nouvel embâcle de la Romanche.
- Nouvelle formation du Lac de St-Laurent.
- Nouvelle rupture du barrage.

DISSENTIS (Grisons, Suisse - 29 Juin 1683)

- Eboulement de 10 à 20 millions de m3 provenant du contrefort occidental de la Garvera.
- 22 victimes.
- Embâcle du Rhin pendant 3 heures, par un barrage dissymétrique.
- Le fleuve s'est creusé un nouveau lit dans le côté le moins haut du barrage.

(*) MONTE AUDA (Alpes Carniques, Italie - 15 Août 1692)

- Eboulement provenant de la rive droite de la vallée du Tagliamento.
- Le hameau de Borta est englouti avec ses 53 habitants.
- La rivière est embâclée par un barrage haut de plus de 100m, avec formation d'un lac long de 10km.
- Première débâcle le 4 Octobre 1692.
- Seconde débâcle le 20 du même mois.


NIEDER-URNEN (Glaris, Suisse - 1703)

- Eboulement du Stockenberg.
- Barrage du lit du Niederurnenbach.
- Formation d'une coulée qui ensevelit la moitié du village de Nieder-Urnen.
- Récidives, mais avec des dommages moins graves, en 1750, 1837, 1856, 1886 et 1887.

DIABLERETS (Valais, Suisse - 23 Septembre 1714)

- Début de désagrégation du versant S.E. des Diablerets le 29 Juin 1714.
- Eboulement du pan de montagne le 23 Septembre (le plus volumineux des temps historiques?).
- Destruction directe de 55 bâtiments; 15 victimes.
- Formation du lac de Derborence, qui existe encore actuellement.

(*) BOURG-SAINT-MAURICE (Savoie - 30 Septembre 1732)

- Nouvelle irruption de l'Arbonne.
- La coulée barre l'Isère.
- La débâcle ravage toute la vallée jusqu'à Grenoble.

ORELLE (Savoie - 22 Décembre 1740)

- Glissement dans le bassin anthracifère du Pousset.
- Barrage de l'Arc par la coulée.
- Un hameau disparaît dans le lac formé à l'amont.

(*) GSPELLERBERG (Haute-Adige, Italie - 1772)

- Nouvel éboulement au Gspellerberg, le sixième en quatre siècles.
- Le Kummer See (déjà formé en 1401), se reforme derrière un nouveau barrage.
- Malgré un exutoire pourvu d'écluses, réalisé par des ouvriers, le barrage cède le 22 Octobre 1774.
- Le lac se vidange en l'espace de 12 heures, et la débâcle inonde la vallée sur une hauteur de 30m.
- Quelques années plus tard, un éboulement forme un nouveau barrage.
- Le nouveau barrage se rompt en 1787, mais la débâcle fut mineure.

TSCHAPPINA (Grisons, Suisse - Fin Novembre 1807)

- Eboulement rocheux dans le lit de la Nolla.
- Les coulées barrèrent le Rhin postérieur jusqu'à une hauteur de 12m.
- L'inondation qui s'en suivit occasionna une dévastation générale de la vallée de Domleschg.
- Les plus anciens éboulements connus de Tschappina remontent à 1585; ils se sont renouvelés en 1705, 1706, 1707, 1710, 1711, 1719, 1807, 1817, 1834, 1868, 1869 et 1870.

(*) MONTE MASUCCIO (Valteline, Italie - 7 Décembre 1807)

- Glissement de terrain provenant des pentes inférieures du Monte Masuccio.
- Embâcle du cours de l'Adda avec formation d'un lac.
- 6 mois plus tard (Juin 1808), rupture du barrage qui ravage la vallée.

(*) COL MANDRO (Dolomites, Italie - Décembre 1825)

- Nouvel éboulement sur le versant N.E. du Col Mandro.
- Le barrage et le lac de retenue sur le Vanoï se reforment.
- Des éboulements successifs en 1826 renforcent le barrage (total de 10 à 12 millions de m3).
- L'affouillement des éboulis au cours de 1826, conduit à des coulées dévastatrices.
- Après le démantèlement partiel du barrage, le lac s'alluvionna régulièrement jusqu'en 1882.
- Dernière vidange brusque et inopinée du lac en 1882 suite à la rupture, à l'amont, d'un autre barrage naturel (voir Val Cia - 1882).

FLETSCHHORN (Valais, Suisse - 19 Mars 1901)

- Eboulement mixte de rocher et de glace provenant du sommet N.W. du Fletschhorn (800 000m3 au départ dont 40% de rocher).
- Volume à l'arrivée de 5 millions de m3 dont 10% de rocher.
- Blocs de 300 à 1 000m3.
- Barrage haut jusqu'à 100m, dans la vallée du Krummbach.
- Le Krummbach put se frayer un passage grâce à la forte teneur en glace, sans former de lac de retenue.

(*) NIEDERHARTERBACH (Tyrol, Autriche - 29 Juillet 1908)

- Glissement de terrain survenu à la suite de pluies diluviennes, dans le massif du Ham Berg.
- Les 300 000m3 de matériaux qui se sont écoulés par le lit du Niederharterbach, barrent le cours de la Ziller.
- La Ziller emporte ses digues, et inonde les vallées sur une longueur de 6km.

(*) MONT-BLANC DE COURMAYEUR (Val Veni, Italie - 14 et 19 Novembre 1920)

- Plusieurs éboulements rocheux provenant de la cote 4381, à l'Est du Mont-Blanc de Courmayeur, totalisent un volume de l'ordre de 4,2 millions de m3.
- Après une chute de 5km de longueur et de 2890m de dénivelée, une très grande quantité de roche et de glace est arrivée dans le val Veni.
- La Doire a été barrée sur une largeur de 300m.
- Le petit lac formé en arrière du barrage n'a duré que quelques jours.

DENT DU MIDI (Valais, Suisse - 20 Septembre 1926)

- Eboulement rocheux dans le bassin de réception du torrent de St-Barthélémy.
- Une première série de coulées le 20 Septembre barre le Rhône qui se creuse un nouveau lit plus à l'Est.
- Deuxième série de coulées le 26 Septembre qui repousse le Rhône encore plus à l'Est.
- Dernière grosse vague de boues et de blocs le 9 Octobre qui remblaient le lit du St-Barthélémy.
- Le volume des éboulements est estimé entre 550 000 et 1 million de m3.

 

Eboulement de la VAL POLA en Italie 1987

Référence bibliographique : NOTE EXPLICATIVE DE L'EBOULEMENT DE VAL POLA - Centre de Coordination et de Contrôle de la Valtellina (1988).

- Prémices d'éboulement dès le 18 Juillet 1987 par disparition du torrent Val Pola dans des fractures ouvertes. - 22 Juillet 1987 : premier éboulement qui barre le cours de l'Adda par formation d'un barrage haut de 40m.

- De l'eau boueuse remonte de 1m seulement à l'arrière du barrage naturel grâce à un barrage artificiel existant à l'amont.

- 28 Juillet 1987 - 7h26' : deuxième éboulement majeur avec 35 millions de m3 au départ et 45 millions de m3 en fond de vallée, formant un barrage haut de 100 à   110m.

- Barrage constitué de matériaux finement broyés par 700m de chute : éboulis 0/20 et quelques % de gros blocs jusqu'à 20T.

- Remontée des éboulis sur plus de 200m dans le versant situé en face de la zone de départ; souffle d'air important, surtout en face de l'éboulement.

- Vague déferlante d'eau boueuse haute de 40m, provenant du lac issu du premier éboulement, et remontant sur 1km à l'amont.

- Eboulis étalés sur 2km vers l'aval du barrage.

- En 20 jours, 20 millions de m3 d'eau s'accumulent derrière le barrage naturel malgré les réserves du barrage artificiel. Bonne tenue du barrage naturel et pas de sur    creusement par le torrent.

Juin 1988 : éboulement résiduel de 200000m3 sans conséquence majeure.

- Travaux réalisés après éboulement : pompage des eaux de l'Adda à l'aide de 3 pompes, pour un débit de 15m3/s; creusement d'un tunnel routier; creusement de   deux tunnels de déviation de la rivière, de 150 et de 250m3/s; creusement d'un canal déversoir en complément des tunnels hydrauliques; renforcement du barrage    par injections et terrassements; remodelage des berges et du cours de la rivière; télésurveillance extensométrique au niveau des zones de départ de l'éboulement.

- Bilan économique : 27 morts lors du deuxième éboulement malgré une évacuation des populations; région touristique isolée; liaison routière détruite; lignes   électriques coupées. Travaux de consolidation, d'aménagements, de rétablissement des communications, et de surveillance non chiffrés.

Référence bibliographique : "LANDSLIDE DAMMING AND ENVIRONMENTAL PROTECTION -- A CASE STUDY FROM NORTHERN ITALY" de Alberto CAMBIAGHI - ISMES, S.p.A. et Robert L. SCHUSTER - U.S. Geological Survey. and International Symposium on Environmental Geotechnology, vol. I, édité par Hsai-Yang Fang et Sibel Pamucku - Lehigh University. Shangai, Mai 1989.

Ces deux auteurs nous apportent, en plus de la description des faits relatés ci-dessus par le Centre de Coordination et de Contrôle de la Valtellina, un certain nombre d'informations plus détaillées sur l'étude et les dispositifs de télésurveillance utilisés lors des événements de Val Pola.

En effet, immédiatement après la première coulée, une banque de donnée a été constituée, comprenant une partie "statique" basée sur des informations existantes (cartes, plans), et une autre "dynamique" reprenant toutes les données qui peuvent évoluer au fil du temps.

Partie "statique"

Cette partie est constituée à partir :

- des cartes et des plans topographiques
- des caractéristiques géomorphologiques et hydrologiques du lieu
- des données géologiques et des informations concernant les structures du massif
- des propriétés physiques et hydrologiques du barrage, ainsi que des facteurs pouvant affecter sa stabilité.
- des propriétés physiques et hydrologique des matériaux géologiques formant les versants du Mont Zandila.
- des paramètres destinés à être utilisés dans les modèles numériques, ainsi que ceux qui sont nécessaires à l'analyse de la stabilité du barrage et des versants de la vallée, mais aussi des données permettant d'évaluer l'amplitude d'une vague qui, par exemple, serait engendrée par la chute de blocs dans le lac de retenue.

La partie "dynamique"

Pour étudier les effets des évolutions du phénomène, le Département de la Défense Civile a installé un système de contrôle utilisant un réseaux de points instrumentés, reliés par radio à l'ordinateur principal des autorités locales. Ces inclinomètres et extensomètres sont placés aussi bien sur le barrage lui même que sur les flancs de la montagne.

Pour étudier les mouvements des versants instables plus éloignés, un système de contrôle acoustique (géophones, hydrophones) a été mis en place.

Des piézomètres ont également été installés dans le barrage.

Ce système de télésurveillance, opérationnel à partir du 31 août 1987, permet l'analyse en temps réel de la situation, et l'élaboration de scénarios concernant les risques qu'encourent les équipes de travail et les populations avoisinantes.

Eboulement de RANDA en Suisse AVRIL MAI 1991

Références bibliographiques :
- NOTE EXPLCATIVE DES EBOULEMENTS DE RANDA C.Schindler, J.D.Rouiller, J.P.Tripet, Y.Cuénod.
- "DIE EREIGNISSE VOM 18 APRIL UND 9 MAI 1991 BEI RANDA (VS) - EIN ATYPISCHER BERGSTURZ IN RATEN" de C.Schindler, Y.Cuénod, T.Eisenlohr et C.L.Joris.
- "EBOULEMENT DU SIECLE EN SUISSE" - Alain R. Zufferey, Revue neige et avalanche n° 57, tiré du Bulletin mensuel du Club Alpin Suisse.
- "LA GESTION DE LA CRISE DE RANDA DANS LA PERSPECTIVE DE L'ECONOMIE DES EAUX" - C. Lichtschlag; (Suisse).
- "L'EBOULEMENT DE RANDA DU POINT DE VUE DE LA PROTECTION CONTRE LES CRUES" - C. Lichtschlag; (Suisse).
- "TRAVAUX DE TITAN A RANDA" - Jacques Dentan, Journal de la construction n° 18, 15 septembre 1991, p. 11-18.
- "LA FORMIDABLE PRESSION DES ANCIENS GLACIERS" - Journal de la construction n° 18, 15 septembre 1991, p. 21-24.

- 18 Avril 1991 - 6h20 : premier éboulement de 20 millions de m3 sur le versant gauche de la vallée de Zermatt, au NW de Randa. Formation d'un immense cône    avec des blocs de plus de 1000m3 (10 000m3 pour la version en langue allemande...). Embâcle de la Vispa, coupure de la voie ferrée, et ensevelissement partiel    du hameau de Unterläch. Important dépôt de poussière, estimé à 1 million de m3 pour l'ensemble des éboulements. Mise en place, le jour même, d'un réseau de     surveillance géodésique, extensométrique, sismographique et visuel. Dégagement du lit de la Vispa et de la voie de chemin de fer.

- 22 Avril 1991 : deuxième éboulement de moindre importance.
- 26 Avril 1991 : imminence d'un événement important mis en évidence grâce au réseau de surveillance (sauf la sismographie qui donne des signaux incohérents).
- 6 Mai 1991 : importants jets d'eau limoneuse (>10m) au niveau d'une discontinuité.
- 9 Mai 1991 : accélération de l'ouverture des fissures dès le matin. Recrudescence des chutes de pierres avec projection de blocs sous forte pression. Coupure de    la route vers 17h00. Troisième éboulement de l'ordre de 10 millions de m3 vers 20h00, et qui dure plus d'une heure. Le cône d'éboulis recouvre la totalité du    hameau, la route, la voie ferrée, et la Vispa sur 1300m.
- 10 Mai 1991 : quelques rares chutes de pierres subsistent. Redéploiement d'un nouveau réseau de surveillance géodésique et extensométrique.
- Travaux réalisés après éboulement : étant donnée la faible perméabilité des deux cônes de déjection, la relative faiblesse du risque d'érosion régressive du barrage,    et la menace réelle d'éboulements ultérieurs, la seule solution au problème de la montée des eaux du lac s'est avérée être le creusement d'un tunnel de dérivation de    la Vispa. Cependant, les délais d'exécution étant longs, des solutions temporaires de surface ont été mises en oeuvre : installation de station de pompage,    creusement d'un canal le long de la ligne d'intersection entre les deux cônes, et réalisation d'un pont flottant, afin de rétablir la liaison routière avec Zermatt.

Malgré ces mesures, nouvelles inondations du village, en Juin et Août 1991.

Ces faits conduisirent à prendre deux mesures complémentaires : l'aménagement d'un conduit de secours de grand diamètre, sous le lit de la partie supérieure du canal, et l'installation d'une grille de freinage des coulées de boue au sommet du cône de déjection du Dorfbach (frein Japonais).

Entre le début 1992 et l'automne de la même année, le percement de la galerie de déviation de la Vispa a été effectué dans le flanc gauche de la vallée (section fer à cheval, 6.5m de hauteur et de largeur, 3.7km de longueur). L'alésage est achevé durant l'hiver 1993-1994. Les débits inférieurs à 18 m3/s continuerons à passer par le canal à ciel ouvert.

 

BILAN DU RECENSEMENT

Sur les 160 grands éboulements recensés dans les Alpes par Fr. MONTANDON, entre le début de notre ère et 1933, 67 ont formé des barrages naturels (environ 42%). Sur les 67 lacs de retenue ainsi formés, 28 se sont vidangés brusquement par suite d'une rupture du barrage (environ 42%), en causant de très importants dégâts dans les vallées. Les 39 autres lacs se sont soit vidés progressivement, soit maintenus en état grâce à la bonne tenue du barrage, ou encore, dans les époques récentes, ont été vidangés artificiellement par des travaux de terrassement afin de prévenir une catastrophe.

Répartition géographique des 67 éboulements alpins majeurs ayant occasionné la formation de barrages naturels :

- France : 18 barrages dont 11 ont eut une rupture brutale (61%).
Certains sites ont eu, au cours de l'histoire, à subir plusieurs fois des événements catastrophiques, ainsi, le site de la Petite Vaudaine a subi 4 éboulements majeurs avec formation de barrage, dont 3 ont eu une rupture brutale. Le site des Fiz a subi 3 éboulements avec formation de barrage, mais sans aucune rupture brutale. Le site de Bourg St-Maurice a subi 2 éboulements majeurs avec formation de barrage, et avec rupture brutale les deux fois.

Le site de Luc en Diois a subi deux éboulements avec formation de barrage, mais un seul des barrages a eu une rupture brutale.

- Italie : 22 barrages dont 9 ont eut une rupture brutale (environ 41%).
Le site de Gspellerberg a subi à lui seul 6 éboulements majeurs en l'espace de quatre siècles, dont 2 ont formé un barrage naturel, suivi d'une rupture brutale. Le site de Col Mandro a subi 2 éboulements avec formation de barrage, dont un seul a eu une rupture brutale. Le site de Val Alba a subi 2 éboulements avec formation de barrage, mais sans rupture brutale.

- Suisse : 19 barrages dont 6 ont eut une rupture brutale (environ 32%).
Le site de Tschappina a subi 12 éboulements importants, dont 3 ont formé un barrage naturel; 2 de ces barrages ont eu une rupture brutale. Le site de la Dent du Midi a subi 4 éboulements avec formation de barrage dont 1 seul a eu une rupture brutale.

- Autriche : 8 barrages dont 2 ont eut une rupture brutale (25%).
Chaque éboulement s'est produit sur des sites différents.

Le manque de données précises ne permet pas d'établir des corrélations entre les volumes ou les morphologies des barrages et leur tenue. Les faits relatés par Fr. MONTANDON, à partir de recherches bibliographiques, permettent uniquement de constater les faits suivants :

- sur la quinzaine d'éboulements avec formation de barrage pour lesquels il n'y a pas eu de rupture brutale, et sur lesquels on dispose de suffisamment de données, les volumes concernés varient de 0,5 à 200 millions de m3. Les hauteurs des barrages varient de 10 à 100m, et la granulométrie va des sols meubles jusqu'à des éboulis comprenant des blocs de 10 à 20m de diamètre. Certains éboulements ont comporté une teneur en glace de 90% (exemple du Fletschhorn en 1901).

Ces barrages ont trouvé un exutoire naturel soit par débordement, soit par percolation, sans entraîner de destruction de l'obstacle. Il est à noter la tenue exceptionnelle du barrage formé lors de l'éboulement de Monte Forca en 1771, haut de 100m pour un volume de 20 millions de m3, et qui a résisté à une vague déferlante créée par un éboulement secondaire dans le lac de retenue.

- pour la quinzaine d'éboulements suivis d'une rupture brutale du barrage formé par les éboulis, et pour lesquels on dispose de données, les volumes connus varient de 0,3 à 100 millions de m3. Les hauteurs des barrages varient de 15 à 200m, avec des blocs dont le volume peut atteindre 100m3.

La rupture brutale des barrages considérés intervient entre quelques jours et 28 ans (éboulement de la Petite Vaudaine de 1191), lorsque l'on considère les ruptures naturelles. La rupture du barrage consécutif à l'éboulement du Col Mandro de 1825 est survenue en 1882 (57 ans après sa formation), suite à la débâcle provenant de la rupture brutale d'un autre barrage naturel situé plus en amont (Val Cia).

DONNEES RELATIVES AUX DUREES DE TENUE DES BARRAGES ALPINS AVANT RUPTURE BRUTALE

- Dobratsch (1348) - volume de 35 millions de m3.
- Glärnisch (1594) - tenue de 9 jours.
- Petite Vaudaine (1612) - tenue de 4 jours malgré un début de terrassement pour aménager un exutoire.
- Val Cia (1882) - sa débâcle entraîna la rupture en chaîne du barrage de Col Mandro situé en aval.

- Monte Auda (1692) - barrage haut de 100m; première rupture partielle 1,5 mois après l'éboulement, suivi d'une seconde rupture 15 jours après.
- Monte Masuccio (1807) - rupture après 6 mois.

- Pizzo Magno (1513) - éboulement d'un volume de 15 à 20 millions de m3, totalisant 80 à 100 millions de m3 avec les éboulis déjà en place; blocs de 100m3; barrage haut de 50m; tenue de 20 mois.
- Gspellerberg (1772) - rupture environ 2 ans après l'éboulement, malgré la construction d'un exutoire avec écluses.
- Bec Rouge (1877) - 3 millions de m3;

- Gspellerberg (1401) - barrage haut de 55m; rupture après 18 ans.
- Petite Vaudaine (1191) - rupture après 28 ans; débâcle ressentie jusque sur les bords de la Méditerranée.
- Col Mandro (1825) - cas particulier, car rupture induite 28 ans après l'éboulement par la rupture d'un autre barrage en amont.