BARRAGES NATURELS DUS AUX GLISSEMENTS DE TERRAIN

partie 1 : Le monde moins les Alpes

DESCRIPTION DES EVENEMENTS

 

Inondation provoquée par la rupture de la moraine de 

KLATTASINE CREEK en Colombie Britannique 1971 et 1973

Référence bibliographique : "A DEBRIS FLOW TRIGGERED BY THE BREACHING OF A MORAINE-DAMMED LAKE, KLATTASINE CREEK, BRITISH COLUMBIA" de John J. CLAGUE, S.G. EVANS - Terrain Sciences Division, Geological Survey of Canada, et Iain G. BLOWN - Hydroelectric Generation Projects Division, British Columbia Hydro and Power Authority.

Entre juin 1971 et septembre 1973, la rupture d'une moraine glaciaire, d'une hauteur d'environ 20m, sur un affluent de Klattasine Creek, a provoqué le relâchement soudain de 1.7 million de m3 d'eau. Les matériaux subsistants, apparaissant dans la brèche, contenaient un grand nombre de blocs de plus de 2m de côté, mais aussi des matériaux fins, du sable et du silt. Le flot a mis en mouvement une grande quantité de matériaux, et créé une coulée boueuse qui a avancé de 8km dans la vallée, et qui a barré temporairement la rivière Homathko, située en aval du phénomène. Ensuite, dans les 14 ou 15 ans qui ont suivi, de nombreuses coulées secondaires sont survenues.

Les événements n'ayant pas eu de témoin direct, ces constatations se basent sur les observations ultérieures de la moraine et de la vallée.

La cause supposée de la rupture du barrage serait un débordement de la retenue, du à d'importantes chutes de pluie, ou à une vague engendrée, par exemple, par une avalanche de neige.

Eboulement de BAIRAMAN en Papouasie Nouvelle Guinée 1985

Référence bibliographique : "THE 1985 BAIRAMAN LANDSLIDE DAM AND RESULTING DEBRIS FLOW, PAPUA NEW GUINEA" - Jonathan KING - Geological Survey of Papua New Guinea, Ian LOVEDAY et Robert L. SCHUSTER - U.S. Geological Survey.

- 11 mai 1985 : un tremblement de terre, de magnitude 7.1 sur l'échelle de Richter, survient dans les montagnes Nakanai, en Papouasie Nouvelle Guinée, non loin de    la ville de Bialla. Au moins six barrages naturels, dus à des glissements de terrain, se forment, jusqu'à 30km autour de l'épicentre. La plupart de ceux-ci se     rompet   rapidement et ne représentent aucune menace importante.

- L'un des plus grands glissements survient à environ 14km de l'épicentre. D'un volume estimé à 180 millions de m3, il obstrue la vallée de la rivière Bairaman sur     plus de 3km, formant un barrage de 200m de hauteur, et entraînant immédiatement la formation d'un lac.

- La plus grande partie du glissement est composée de graviers calcaires, bien classés, de silt, sable, galets, ainsi que de blocs de taille plus importante, ces derniers   ne représentant que 5 à 10% des matériaux constituant le massif. Les particules fines, de faible plasticité, ne contiennent pas d'argile. Les matériaux composant la   partie supérieure de la coulée sont plus fins, moins compactés, et ne présentent plus de fragments de grande taille.

- 15 mai 1985 : la menace représentée par la possible rupture du barrage est jugée conséquente pour les habitants du village Bairaman.

- Les observations révèlent l'existence de chenaux d'écoulement d'eau sur la face aval de l'ouvrage, dont certains semblent avoir été creusés par le ruissellement des   eaux de pluie. L'un d'entre eux est situé au point le plus bas de la crête du barrage, au point de débordement.

- 9 janvier 1986 : des résurgences d'eau sont observées dans les versants de la vallée, 3km à l'aval du barrage.

- 20 mai 1986 : le chenal central présente une forte érosion.

- 3 août 1986 : le lac a atteint un volume de 50 millions de m3, et sa surface n'est plus qu'à 11m de la crête du barrage. L'infiltration se développe, et la possibilité   d'une rupture de l'ouvrage, consécutive à l'érosion interne, est envisagée.

- Le "Geological Survey of Papua New Guinea", et le "National Disaster Comittee", décident alors de provoquer la rupture du barrage, à l'aide de charges   explosives placées dans une tranchée, au sommet du barrage, espérant ainsi ouvrir une brèche dans le massif.

- 11 septembre 1986 : mise à feu des charges. Après l'explosion, la cohésion des matériaux, situés au point le plus bas de la crête, est fortement diminuée, et seules   quelques heures de travail sont nécessaires pour creuser le canal jusqu'au niveau du lac, et établir l'écoulement dans celui-ci.

- 12 septembre 1986 : Une rupture apparaît au sommet d'un des chenaux situés sur le versant aval du barrage, participant ainsi à l'accroissement sensible du flot.   Simultanément, le canal d'évacuation central est approfondi par l'érosion, jusqu'au bedrock. L'effondrement des versants des différents chenaux conduit petit à   petit  à la rupture du corps même du barrage. En un peu plus de 2h, 40 millions de m3 d'eau sont relâchés, et 80 millions de m3 de débris vont être érodés, laissant   tout de même subsister un lac d'un volume de 10 millions de m3, et 64 millions de m3 de débris à l'endroit du barrage.

- Seules les observations relevées à l'embouchure du cours d'eau et, dans la vallée le lendemain de l'événement, permettent d'estimer l'ampleur de la crue, les nuages    bas, couvrant la vallée, ayant empêché de suivre directement le phénomène. Si le flot, hyper-concentré en sédiments étant donné la quantité de matériaux érodés, a    atteint une hauteur maximale de 100m juste après le barrage, il a encore 8m de haut lorsqu'il aboutit à l'embouchure de la rivière, 39km en aval. Les estimations    des débits de la crue, à partir de la section de la vallée et de la vitesse d'écoulement, donnent des valeurs comprises entre 22000 et 27000m3/s.

- Le village Bairaman est totalement détruit, mais son évacuation a permis d'éviter toute perte humaine.

Barrage de la rivière TUNAWAEA en nouvelle Zela 1991

- 17 et 18 août 1991 : un glissement de terrain d'un volume estimé à 4 millions de m3, obstrue l'étroite vallée de la rivière Tunawaea.

- Le barrage ainsi formé avait une longueur de 380m à la base et de 60m en crête, une largeur de 80m et une hauteur de 70 à 100m. Il était constitué de matériaux    homogènes, d'un diamètre moyen de 300mm, avec quelques blocs dont le diamètre maximal n'excédait pas 2m.

- Durant les trois mois qui ont suivi, le remplissage du lac s'est opéré, atteignant une profondeur de 50m, avec un volume estimé à 900 000 m3.

- 22 juillet 1991 : la rupture du barrage se traduit par une rapide montée des eaux de la Waïpa, dont la Tunawaea est un affluent. Le débit de pointe de la crue a été    estimée à 250 m3/s.

- La rupture n'a eu aucune conséquence notable à l'aval.

Barrage de la JOSEPHINA en Equateur 1993

Référence Bibliographique: "LE GLISSEMENT DE TERRAIN ET LES INONDATIONS CATASTROPHIQUES DE LA JOSSEFINA" - E. CADIER - Directeur de Recherche à l'ORSTOM Quito, O. ZEVALLOS - Professeur à l'Ecole Polytechnique Nationale Equatorienne, A. VACCA - Chef du Projet INSEQ à l'INAMHI Quito.

- 29 Mars 1993 : Deux glissements consécutifs, d'un volume total estimé de 20 à 30 millions de m3 (1.1km de largeur, 100m d'épaisseur), qui barre la rivière Paut      et provoque la mort de 35 personnes. La densité moyenne des matériaux du glissement est estimée à 2.76, avec une porosité de 15%, un angle de friction de 45°    et un diamètre moyen de 100mm.

- Formation immédiate d'un lac de retenue.

- Creusement d'un canal artificiel de 6m de large en rive droite, au point le plus bas du barrage. Par l'évacuation de 165 000m3 de déblais, la crête du barrage est        rabaissée de près de 20m, évitant l'inondation de 250ha en amont.

- 14 Avril 1993 : arrêt prématuré des travaux, provoqué par une sous-évaluation du temps de remplissage et la crainte d'une rupture du barrage par phénomène d    renard hydraulique.

Le canal, creusé sur le sommet de la digue, est à plusieurs reprises obstrué par des éboulements. Il s'en suit une augmentation du niveau du lac, de 6m au dessus du radier initial du canal.

- 25 Avril 1993 : l'eau commence à s'écouler dans le canal.

- 30 Avril 1993 : les militaires tirent des missiles antichar pour tenter de fissurer un bloc qui obstrue le canal.

- 1er Mai 1993 : alors que le lac a atteint un volume de près de 200 millions de m3, noyant une zone fertile et habitée de 800ha, le débit s'accroît de manière    spectaculaire, de quelques dizaines de m3/s à environ 10 000m3/s. Les dégâts en aval sont énormes, de nombreuses routes, cultures et maisons étant balayées par    la crue. Il n'y cependant aucune victime humaine à déplorer.

Remarque : La morphologie de la vallée a été profondément modifiée par la crue, et si le barrage hydroélectrique Daniel Palacios a été épargné de justesse, une grande quantité de sédiments ont pénétré dans le réservoir, réduisant ainsi de nombreuses années sa durée de vie utile.

Barrage de la rivière TORO au Costa Rica 1995

- 13 juin 1992 : un glissement de terrain d'un volume de 3 millions de m3 barre la vallée très étroite et escarpée de la rivière Toro, 45km au nord-ouest de Costa    Rica. Un séisme d'une amplitude de 7.5, survenu en avril 1991, semble être à l'origine du phénomène : ayant créé des fissures dans le massif constitué de roches    volcaniques, il a favorisé l'infiltration des pluies intensives de la première moitié du mois de juin.

- Le barrage est constitué pour 20% de blocs d'un diamètre supérieur à 2m, pour 50% de blocs de 0,5 à 2m de diamètre, et pour 30% de blocs inférieurs à 0.5m        et  de fines. De 75m de large et 600m de longueur, sa hauteur varie de 70 à 100m.

- Derrière ce barrage, s'est formé un lac d'une profondeur de 52m, dont le volume estimé à 500 000m3 a été atteint en 3 jours.

- 16 juin 1992 : la rupture du barrage survient, emportant 270 000m3 de matériaux, et provoquant de nombreux glissements secondaires qui bloquent    temporairement les écoulements. Ce phénomène se reproduit à nouveau les 24, 27, et 30 juin, ainsi que les 2, 4, et 10 juillet. Le débit de pointe est    estimé à    400m3/s, à travers une brèche de 40 à 80m de large et une profondeur de 30 à 50m. Il est à noter que des infiltrations au travers du corps du barrage    sont    observées pendant la durée du processus : c'est un des rares cas de rupture causée par l'érosion interne du barrage.

- Suite à la rupture, 600 millions de m3 de matériaux ont été entraînés et déposés sur une distance de plus de 1000m à l'aval. Seul sont restés en place les gros    blocs. Il a été estimé qu'il faudrait environ 10 ans pour que 80% des sédiments soient érodés par la rivière.