Talus de
déblais dans un massif rocheux.
Un massif rocheux
est parcouru par de nombreuses discontinuités qui sont
caractérisées par :
L'orientation de la
discontinuité est définie par deux angles, l'angle de
plus grande pente et la direction définie par l’azimut,
référence par rapport au Nord
magnétique.
La persistance qui
correspond à la continuité dans l'espace des fractures et
permet d'avoir une idée du volume de la masse de la roche
instable délimitée par la
discontinuité.
L'espacement entre
deux discontinuités, mesurée perpendiculairement à
celle-ci. Cette valeur et celle de la persistance définissent
la taille des blocs.
Les
propriétés de surface des discontinuités influent
sur la résistance au cisaillement. Ainsi la dilatance des
discontinuités donnera une idée du comportement du
massif.
Les inclusions qui
peuvent remplir les discontinuités influent sur les
propriétés mécaniques et hydrauliques. Par exemple
des cémentations peuvent donner une cohésion
significative entre les blocs, mais peuvent aussi être
facilement détruites lors de tirs de mines.
Une étude de
stabilité de massif rocheux commencera donc par la
détermination la plus précise possible de ces
paramètres. Ceci fait, les différents modes de rupture
pourront être appréhendés et
étudiés.
Il existe plusieurs
mode de représentation des discontinuités.
L'analyse
stéréographique des géologues permet une
représentation de celles-ci. Cette analyse va permettre de
passer de l'espace usuel en 3D, à un espace représentatif
sur une feuille de papier, en 2D. L'angle de plus grande pente
d’une surface plane prend une valeur comprise entre 0 et 90
degrés, qui est donnée par rapport à
l’horizontale. L’azimut, par rapport au Nord
magnétique, du plan vertical contenant la direction de la plus
grande pente prend une valeur de 0 à 360
degrés.
Ces deux valeurs
sont introduites dans le canevas de Schmitt qui par projection
conserve les surfaces et permet l'utilisation des courbes iso-
densité. Les plans de discontinuité, définis par
leur deux angles, sont alors représentés par un point. De
la même façon, le plan du talus rocheux sera
représenté sur le canevas.
Fig 6 - 2
Canevas de Schmitt
Cette
représentation permet de détecter différents modes
de rupture.
6 - 2 - 1 - Rupture
plane.
Une masse instable
glisse sur un plan de discontinuité. Pour qu'une rupture plane
soit à craindre, il faut que les quatre conditions suivantes
soient réunies:
La direction de la
plus grande pente doit être à moins de 20 degrés de
la direction du plan du talus.
L'angle de plus
grande pente doit être inférieur à l'angle du talus,
et la discontinuité doit déboucher dans la pente du
talus.
L'angle de plus
grande pente doit être supérieur à l'angle
caractérisant le frottement plan sur plan de la
discontinuité.
L’extension
latérale de la rupture doit être possible soit par
l'absence de matériaux (fin du talus), soit par la
présence de discontinuités (failles verticales par
exemple) qui ne contribuent pas à la stabilité de la
masse potentielle en mouvement.
Les trois
premières conditions se vérifient diectement sur le
canevas de Schmitt, la dernière par la lecture du projet ou
l'observation du site. La présence d'eau peut infirmer la
troisième règle et l'étude hydraulique est alors
nécessaire.
Le calcul d'une
rupture plane se fait alors par une méthode d'équilibre
limite à deux dimensions. Généralement
l'ingénieur a à faire à l'un des deux cas
suivant:
Une fissure de
traction en tête du glissement recoupe la pente, (fig. 6 - 3)
ou une fissure de traction en tête du glissement recoupe le
talus. (fig. 6 - 4)
Fig 6 - 3 -
Rupture plane.
Fig 6 - 4
Rupture plane limitée à l’amont.
avec les notations
des figures ci-dessus, le calcul fournit la relation
suivante :
F = {cA + [ W
(cos yp - a sin yp) -U -V sin yp + T cos q ] tan j} / [W
(sin yp + acos yp) + V cos yp - T sin q]
avec
H = hauteur du talus
yf = pente du talus
ys = pente terrain naturel, au-dessus du
talus
yp = pente du plan de
rupture.
gr = poids spécifique du
rocher
a
= accélération horizontale. (séisme,
tir)
b
= distance de la fissure à la crête du talus
T
= force d'ancrage ou de boulonnage
q = inclinaison de l’ancrage par rapport
à la normale du plan de rupture
c
= cohésion sur le plan de rupture
j = angle de frottement
gw = poids spécifique de
l'eau
Z
w = hauteur d'eau dans la fissure
Z
= profondeur de la fissure
A
= longueur de la surface de rupture. (par unité de longueur
dans la direction perpendiculaire)
U
: poussée de l'eau sur le plan de rupture = 0.5
gw Zw A
V
: poussée (horizontale) de l'eau dans la fissure = 0.5
gw
Z2w
W
= poids du bloc en mouvement
Pour le cas de la
figure 6 - 3
Z
: profondeur de la fissure de traction = (H cotan
yf - b) (tan yf - tan yp)
W
: poids du bloc = 0.5 gr
H2 [(1 - Z/H)2 cotan yp(cotan yf tan yp - 1)]
L
: longueur de la rupture = (H cotan yf - b) (1 / sin yp)
A
= (H cotan yf - b) / cos yp
et pour le cas de la
figure 6 - 4
Z
: profondeur de la fissure de traction = H + b tan
ys - (b + H cotan yf) tan yp
W
: poids du bloc = 0.5 gr (H2 cotan
yf X + bHX + bZ), avec X = (1 -
tan yp cotan yf)
L
: longueur de la rupture = (H cotan yf + b) / sin yp
A
= (H cotan yf + b) / cos yp
Ces formules
permettent de mettre en évidence la sensibilité aux
conditions hydrauliques et aux conditions sismiques.
6 - 2 - 2 -
Stabilité d'un dièdre
Les dièdres
résultent de glissements le long de deux discontinuités
dont les angles de plus grande pentes intersectent le talus, en
formant un dièdre instable. Cette instabilité peut
être immédiate ou différée dans le temps, de
faible ou de grand volume. Certaines lithologies sont plus
favorables au développement de telle rupture.
Les conditions d'une
rupture en dièdre sont :
La ligne
d'intersection des discontinuités doit être voisine de la
ligne de plus grande pente du talus
La pente de cette
ligne d'intersection plus faible que celle du talus, et cette ligne
d'intersection doit émerger sur le talus.
La pente de la ligne
d'intersection doit être plus grande que l'angle de frottement
des discontinuités. Si les angles des deux discontinuités
sont différents une moyenne peut être faite.
Aucune
hypothèse n'est nécessaire sur l’extension
latérale de la rupture.
L'analyse de
stabilité de type équilibre limite conduit aux formules
suivantes le dièdre étant formé par les plans a et
b.:
Définitions des
paramètres. (fig 6 - 5)
af : azimut du talus.
aa : azimut du plan a
ab : azimut du plan b
yf: angle de plus grande pente du
talus
ya : angle de plus grande pente du plan
a
yb : angle de plus grande pente du plan
b
j : angle de frottement
yi: angle sur l'horizontale de
l'intersection des plans de rupture
ai : azimut de l'intersection des plans
de rupture
Les conditions de la
rupture sont :
ai presque égal à
af
yi < yf
j < yi
fig 6 - 4 -
Définition d’un dièdre.
si
aa ou ab est entre ai ou af alors la rupture à lieu sur le
plan a ou b le plus pentu, suivant la pente maximale; sinon le
glissement à lieu suivant la ligne
d'intersection.
L'analyse
à la rupture conduit à la formule suivante dans le cas
d'un sol sans eau :
F = (3 /
gr H)(ca X + cb Y)
+ ( A - X gw / 2 gr) tan ja + ( B - Y gw / 2 gr) tan jb avec
c
a et cb cohésion sur les plans a et
b,
ja et jb, angles de frottement sur les plans a
et b
gr poids volumique de la
roche,
H,
hauteur totale du dièdre
yaet yb angle de plus grande pente des plans
a et b
yi angle sur l'horizontale de la droite
d'intersection des deux plans.
X
= sin q24 / (sin q45 cos qna.2)
Y
= sin q13 / (sin q35 cos q nb.1)
A
= (cos ya - cos yb.cos qna;nb) / sinfi sin 2
qna.nb
B
= (cos yb - cos ya.cos qna.nb) / sin yi sin 2 qna.nb
Les angles sont
définis sur la fig 6 - 6
Un cas courant est
celui ou le frottement est le même sur le deux face du
dièdre. La formule se simplifie en :
F = (sin
b
/ sin (z / 2) ) . (tan j / tan yi )
avec
b
l’angle entre
l’horizontale et la bissectrice du dièdre dans un plan
perpendiculaire à l’arrête du dièdre,
x
angle entre les deux plans du
dièdre, j l’angle de frottement, et yi l’angle d’inclinaison de
l’arrête du dièdre.
Fig 6 - 6 -
Angles pour le calcul de la stabilité d’un
dièdre.
6 - 2 - 3 - Rupture
par basculement.
6 - 2 - 3 - 1 -
Basculement généralisé.
Ce mode de rupture
s'appelle usuellement le fauchage. Il peut se produire dans un
massif rocheux découpé en colonne par des fractures
à peu près normales à la pente et s'enfonçant
profondément dans le massif. Dans ce type de rupture, les
dalles verticales glissent entre elles et se plient autour d'un
centre de rotation aux environs de la base de la pente. Les roches
les plus soumises à ce type de déformation qui peut
entraîner la rupture sont les basaltes (en orgue), les roches
sédimentaires ou métamorphiques ayant des foliations bien
développées Pour que la rupture se développe le
centre de rotation doit être en dehors de la base. Les
mouvements horizontaux importants sont en tête alors qu'ils
sont très faibles à la base. Le frottement entre les
dalles est un paramètre fondamental pour le développement
du mouvement. Les mouvements antécédent qui induisent des
tensions sont aussi un facteur de rupture et donc, l'histoire du
massif est à prendre en compte. La rupture
n’apparaît pas tant que la résistance au
cisaillement entre les dalles, ou les colonnes n'est pas nulle. De
l'eau en pression dans les fissures ou une érosion en pied
peut déclencher la rupture.
L'analyse
cinématique de ce mouvement montre que les conditions
suivantes doivent être requises pour conduire la pente à
la rupture.
La direction des
dalles doit être, à 20 degré près,
parallèle à la surface du talus.
La plus grande pente
des dalles doit être orientée vers l'intérieur de la
pente, à 20 degré près.
Pour qu'un
glissement entre les plans puisse se produire, la normale au plan
de fauchage doit être inférieure à l'angle de la
pente diminué de l'angle de frottement entre les plans. Soit
: (90º - yp) < (yf - jp ) (Goodman, 1980). Cette formule a
été précisée par Choquet et al, 1985, suivant :
(90º - yp) < (yf - jp +k ) ou k = 0 pour
jp< 20º, sinon k = 3/5
(jp - 20 )
Une limitation
à l’extension latérale peut avoir une influence
importante sur ces conditions.
Les méthodes de
calcul pour ce type de rupture se heurtent à une bonne
définition du coefficient de sécurité. On cherche
à vérifier que le centre de gravité de la colonne
reste au-dessus de sa base.( voir Hoek, Bray, 1981).
La méthode des
éléments distincts (Cundall, 987) (Lorig et al., 1991)
est actuellement employée pour le fauchage (Durville, ).
Développée dans le temps elle décrit un
mécanisme possible d’évolution. (Fig. 6 -
7)
Fig 6 - 7 -
Utilisation des éléments distincts pour étude du
fauchage.
Les principes de
cette méthode sont les suivants :
La masse rocheuse
est décomposée en blocs individuels capables de
déplacements et rotation.
Les forces
d'interaction dépendent des positions relatives des
blocs.
Le schéma de
résolution est explicite dans le temps. C'est à dire
qu'un premier bloc est autorisé à se déplacer, ce
qui entraîne un mouvement possible pour un autre bloc et ainsi
de suite. (voir aussi annexe de ce chapitre)
6 - 2 - 3 - 2 -
Stabilité d'une colonne.
La stabilité
d'une colonne dépend essentiellement de sa géométrie
et des conditions hydrauliques à l'arrière qui se
manifeste par une poussée hydrostatique horizontale. On peut
ainsi calculer la répartition des contraintes sur un plan
horizontal à la base de la colonne. Suivant l'allure de cette
répartition la rupture peut être envisagée par
basculement ou par rupture du pied. Le second cas est moins
dangereux que le premier, les éboulis ayant une extension
moindre.(fig.6 - 8)
Le second cas peut
être apparenté à une rupture par flambement, lorsque
la discontinuité entre les dalles est parallèle à la
pente du talus. Cette rupture peut se produire dans des talus
très haut, vu la résistance usuelle de la
roche.
Fig 6 - 8 -
Equilibre d’une colonne.
6 - 2 - 3 - 2 -
Rupture dans la masse.
Ces ruptures se
produisent dans des matériaux rocheux très
fracturés, c'est à dire lorsque la dimension des blocs
est petite devant la dimension de la rupture. C'est pourquoi des
grandes ruptures dans des matériaux fracturés peuvent
être étudiées avec des méthodes mises au point
pour les sols. Le matériau est considéré comme
continu.
6 - 3 -
Bibliographie.
Bishop et Bjerrum
(1960)
Henkel
(Kankare,
1969)
(Picarelli et al.,
1995)
Skempton
(Vaughan et al.,
1973)