Géotextiles
De plus en plus utilisés car c'est un domaine d'inovations tant du point de vue chimique que pour l'usage de propriétés mécaniques nouvelles.
1. Ce qu'est un géotextile
Technologie

Le tricotage chaîne ou “warp knitting”

Une technologie utilisée permet d’obtenir des caractéristiques techniques de haut niveau sur les produits géotextiles, en particulier pour la résistance des matériaux et leur comportement dans le sol.
Cette technologie appelée « warp knitting » ou « tricotage chaîne » autorise l’insertion et le liage de fils droits en chaîne (dans la longueur, le sens de sortie du textile ou sens production) et en trame (dans la largeur du métier ou du textile) conférant au produit un usage bloqué dans les deux directions. On utilise pour cette technologie des métiers « chaîne » ou des métiers « Rachel ».
Chaînette :
On observe ici la fabrication d’une chaînette. Le fil alimente toujours la même aiguille. Sur le métier, il y donc autant de fils et d’aiguilles que nécessaire pour réaliser une largeur complète de textile (5,30 m par exemple) avec un espacement des aiguilles choisi. Le textile final tel qu’il est ici n’a pas de structure car il n’y a pas de liage en sens trame.
Trame partielle :
Dans ce cas, une barre à passette fournit du fil sur des aiguilles différentes par un mouvement de translation sur la largeur. Les chaînettes sont liées entre elles et confèrent au textile un premier niveau de blocage.
Chaînes et trames rectilignes :
En sélectionnant le travail de certaines aiguille et en utilisant un « trameur », il est possible d’insérer des chaînes et trames parfaitement rectilignes. On assure un niveau de blocage supplémentaire et la maîtrise de la résistance mécanique des produits.

La combinaison de ces procédés est possible pour maîtriser les paramètres d’extension et de blocage du textile. Ceci marque la différence entre cette technologie et le tissage qui résulte d’un entrecroisement plus ou moins complexe de chaînes et de trames.

Le tissage

Les non tissés
















En effet, on peut grâce au « warp knitting » bénéficier immédiatement de 100% des caractéristiques des fils techniques utilisés sur les métiers. En fonction des qualités de fil, on obtient des caractéristiques mécaniques exceptionnelles ainsi qu’une certaine « raideur » qui facilite avantageusement une stabilité dimensionnelle, une haute résistance en traction, un haut module d’élasticité, un excellent coefficient de frottement entre le sol et le géotextile, etc…
Des produits complexes
Des complexes multimatières, multicouches, multifonctions…

Les technologies de liage ouvrent un champ d’action sans limite car en plus de la linéarité des fils techniques, elle permet d’associer entre elles différentes matières, ceci :
  • Par diversification des fibres et fils utilisés (aramide, polyester, polypropylène…)
  • Au niveau des couches de textile utilisées (textiles 3D, textile couplé avec réseau de renfort, etc...)


On obtient des produits multifonctions aux propriétés intéressantes (renforcement + séparation, instrumentation pour mesures, passages de câbles, etc...)
Des garanties
Produits certifiés
Les produits  les plus couramment commercialisés sont certifiés par l’ASQUAL par l’intermédiaire de laboratoires accrédités. Ceci permet une fiabilité des valeurs annoncées et un agrément rapide des produits par les maîtrises d’ouvrages.
Marquage
L’ASQUAL assure aussi le marquage CE des produits. Ce marquage obligatoire pour chaque produit commercialisé en Europe assure un niveau minimal de sécurité pour la mise sur le marché.
Organisations professionnelles et scientifiques
Le milieu industriel, commercial et scientifique est lié par plusieurs organisations professionnelles, au niveau français et international. De nombreux congrès montrent le dynamisme de la profession.
2. Les essais
Caractérisation
    • Masse surfacique

Norme référence : NF EN ISO 9864       
      • Descriptif de l’essai

On pèse à l’aide d’une balance de précision un échantillon de 100 cm² de géotextile.

L’échantillon doit être représentatif du matériau. Les éprouvettes sont donc découpées avec un emporte pièce assez loin des « bordures de métier à tricoter » ou des « lisières du tissu » qui peuvent donner lieu à des variations de masse.
      • Résultats obtenus

On en déduit facilement la masse surfacique du produit en g/m². La masse surfacique des géotextiles est importante car elle définit les quantités de matière mises en jeu dans les renforcements ainsi que les masses probables des rouleaux à mettre en œuvre.
    • Epaisseur à 2 kPa

Norme référence : NF EN ISO 9863-1         
      • Descriptif de l’essai

On dispose d’un appareil de mesure muni d’un pied presseur et instrumenté à l’aide d’un comparateur. On charge le pied avec une masse qui permet d’appliquer une pression de 2 kPa sur le géotextile.

Le comparateur donne la distance entre le plateau inférieur sur lequel repose le géotextile et la surface du pied presseur qui applique la pression sur le géotextile.
      • Résultats obtenus

La valeur indiquée par le comparateur nous donne l’épaisseur du géotextile en mm.
Essais mécaniques
    • Essai de traction des bandes larges

Norme référence : NF EN ISO 10319     
      • Descriptif de l’essai

On utilise une machine de traction a vitesse de déformation constante équipée d’un logiciel spécialisé. On place entre les mâchoires de la machine des éprouvettes de 200 mm de large et 100 mm de long, pincées à un effort connu. L’essai s’arrête lorsqu’il y a rupture en traction de l’éprouvette.

      • Résultats obtenus

Cet essai est très important car il permet de caractériser les capacités mécaniques du géotextile qui sont essentielles dans les applications de renforcement.

On obtient la courbe des efforts en kN, en fonction de la déformation ainsi que l’effort et la déformation en traction à la rupture. La courbe peut servir à calculer le module élastique sécant en kN/m.
    • Essai de frottement

Norme référence : prEN ISO 12957   
      • Descriptif de l’essai

On fait un essai à la boîte de cisaillement encore appelée boîte de Casagrande.

Les sols sont compactés dans les parties inférieures et supérieures de la boîte. Le géotextile est installé dans le plan préférentiel de cisaillement.
      • Résultats obtenus

Cet essai permet de caractériser l’angle de frottement φ en degré entre un sol donné et le géotextile. Cette valeur est importante pour déterminer les ancrages des nappes de géotextile et les efforts de traction mobilisables par frottement dans les nappes. On peut aussi exprimer le résultat sous forme d’un ratio : 


On utilise généralement 3 types de sols pour pouvoir caractériser l’interaction sol-  geotextile  : un sable, une gravette, une argile.
    • Essai de poinçonnement statique CBR

Norme référence : NF EN ISO 12236 
      • Descriptif de l’essai
Une éprouvette de géotextile est coincée entre deux anneaux en acier. On vient appliquer perpendiculairement un poinçon entre ces deux anneaux. Cet essai permet de simuler l’endommagement du géotextile par poinçonnement des grains de sols.
      • Résultats obtenus

On peut obtenir la courbe force en kN – enfoncement en mm, ainsi que la résistance au poinçonnement en kN et l’enfoncement de poinçonnement en mm.
    • Essai de perforation dynamique

Norme référence : NF EN ISO 918 
      • Descriptif de l’essai

Une éprouvette de géotextile est coincée entre deux anneaux en acier. Un cône normalisé en acier est lâché en chute libre d’une hauteur de 500 mm, guidé vers le centre de l’éprouvette. Cet essai permet de simuler l’endommagement du géotextile lors du passage de charges roulantes par exemple.
      • Résultats obtenus

Le cône étant gradué, il est possible de connaître le degré de pénétration par simple lecture. Il s’agit du diamètre en mm du trou formé par la pointe une fois l’essai terminé.
Essais hydrauliques
    • Essai de perméabilité


Norme référence : NF EN ISO 11058
      • Descriptif de l’essai

La mesure du coefficient de perméabilité des géotextiles se fait à l’aide d’un perméamètre. Le principe est de relier le débit q qui traverse un échantillon de géotextile avec la charge hydraulique sous laquelle se produit lécoulement.
      • Résultats obtenus

On obtient le coefficient de perméabilité exprimé en m/s. Ce coefficient est essentiel dans toutes les applications de filtration, notamment dans le cadre de l’utilisation des géotextiles pour les ISD (Installations de Stockage des Déchets). L’épaisseur du géotextile et le niveau de contrainte normale sur l’éprouvette sont des facteurs déterminant dans cet essai.


    • Essai d’ouverture de filtration

Norme référence : NF EN ISO 12956 
      • Descriptif de l’essai
On fait circuler un débit d’eau définit à travers le géotextile en présence d’un matériau granulaire. Le matériau granulaire contient assez d’éléments passants à chaque tamis pour être représentatif. Le tout est placé sur une table vibrante.
On recueille en sortie l’eau qui a circulé à travers le lit de sol + géotextile.
      • Résultats obtenus
L’ouverture de filtration est la taille en µm du plus gros grain de sol capable de traverser le géotextile. Il suffit de tamiser les grains qui sont arrivés à percoler jusqu’au récipient final pour connaître cette valeur.

C’est un résultat important car certains géotextiles ont pour vocation la séparation entre les couches de sols en laissant l’eau circuler, voire même la filtration de particules. On connaît ainsi leur limite en filtration.
    • Essai de capacité de débit dans le plan

Norme référence : NF EN ISO 12958 
      • Descriptif de l’essai
L’essai est réalisé à l’aide d’une cellule de mesure conforme à la norme citée ci- dessus. L'alimentation en eau se fait à température constante et aux gradients hydrauliques souhaités.
      • Résultats obtenus
L'appareillage permet la mesure sous contrainte de compression de la capacité de débit dans le plan en m²/s de tous les produits géosynthétiques. Le débit dans le plan est influencé par de multiples facteurs dans le sol, notamment l’imbrication des grains et le colmatage éventuel entre les mailles du géotextile. La capacité de débit dans le plan doit être interprétée avec prudence.
3. Emploi
Les géotextiles peuvent assurer des fonctions mécaniques et hydrauliques :
    • Renforcement
    • Protection
    • Filtration / Séparation


AVANTAGES DES GEOTEXTILES
    • Utilisations de matériaux sols « in-situ » en remblais
    • Réduction des épaisseurs de couches
    • Accroissement de la portance
    • Amélioration de la continuité des plates-formes
    • Homogénéisation des tassements
    • Limitation des travaux d’excavation
    • Souplesse d’utilisation et facilité de mise en œuvre
    • Possibilité d’ouvrages végétalisés
    • Ouvrages avec faible emprise au sol
    • Gestion du chantier
    • Longue durée de vie…


C’est une solution économique, fiable, permettant les travaux dans des accès difficiles et respectant les contraintes environnementales des constructions modernes.
Renforcement
Fonction mécanique de renforcement

Les sols sont composés de particules  organiques ou minérales. Ils sont qualifiés de fins ou grenus suivant le diamètre de leurs particules. Ainsi, ils sont plus ou moins cohérents, mais disposent de très peu voire aucune résistance en traction suivant leur nature. Ainsi, leur stabilité ne peut être assurée dans un massif que par leur poids propre et leur résistance au cisaillement.

Les géotextiles ancrés dans le massif par frottement travaillent en traction. Ce sont des armatures qui reprennent les efforts de poussée des terres et surcharges.
Séparation
Fonction de séparation

Le géotextile permet d’éviter la circulation des fines particules vers une couche supérieure grenue, tout en laissant passer l’eau.

Ainsi il est ainsi possible :
    • D’éviter une dégradation de surface et la création d’ornières lors du passage de véhicules.
    • De maîtriser l’évacuation verticale des eaux de pluie grâce la porosité contrôlée des produits.
Filtration
4. Mise en oeuvre
Pose
Avant travaux

Agrément des géotextiles

L’agrément se prononce par comparaison entre les caractéristiques spécifiées dans les documents contractuels du marché, sur la base des recommandations du C.F.G. et les fiches produits proposées par les constructeurs de géotextiles.
    • Dans le cas de produits certifiés*, une simple comparaison visuelle est nécessaire.
    • Pour les autres produits, il faudra vérifier que le géotextile est soumis aux différents tests normalisés pour la détermination de ses caractéristiques et poser d’éventuelles réserves en cas de non-validité, voir refuser l’agrément après analyse.

Préparation de chantier

La construction est organisée comme un chantier de terrassement classique et dépend donc des possibilités d’approvisionnement, de mise en œuvre, et de compactage.


A la réception des géotextiles

Le contrôle des géotextiles est nécessaire pour s’assurer qu’il n’y a pas eu d’erreur lors de la fourniture ou sur les valeurs caractéristiques annoncées.

Pour un contrôle minimum, il convient de vérifier l’étiquetage, le marquage CE et s’il y a lieu l’étiquette de certification qualité. On pourra alors procéder à deux vérifications simples et rapides pour recoupement avec les valeurs annoncées qui sont :
    • la détermination de la masse surfacique*
    • la détermination de l’épaisseur nominale du géotextile*

Ensuite, un contrôle des caractéristiques est nécessaire. La vérification est d’autant plus poussée que le rôle du géotextile dans l’ouvrage suivant sa nature est important. Dans les « recommandations pour l’emploi des géotextiles dans le renforcement des ouvrages en terre », on trouve des tableaux permettant d’expliciter le degré d’importance du géotextile dans l’ouvrage ainsi que les essais à réaliser dans chaque cas avec leur fréquence. Il est à noter que l’utilisation de géotextiles certifiés* allège considérablement ces contrôles.

Une fiche de prélèvement type pour essai est aussi disponible dans les documents du CFG.
Stockage et manutention
      • Stockage

De manière générale, il ne doit pas compromettre les possibilités de mise en oeuvre (gel, imbibition...) ni leurs caractéristiques (U.V., dégradations...).

Pour cela, il est notamment nécessaire de stocker le géotextile sur palettes (hors d’eau) à l’abri des U.V. dans une enveloppe opaque du fait de la dégradation de certains polymères soumis à cette sollicitation. Lorsque le produit peut-être utilisé comme filtre, il convient aussi d’empêcher son colmatage.
      • Manutention

Bon nombre de produits livrés sont de dimensions et poids variables. Leur déplacement peut en conséquence être manuel ou nécessiter des engins de levage et de transport. Pourtant, les rouleaux comportent toujours un mandrin qui permet l’utilisation des engins simples de manutention disponibles sur tout chantier.


Pose des géotextiles
      • Pose

Elle s’effectue sur plate-formes compactées et nivelées, sans éléments saillant susceptibles d’endommager les nappes de géotextiles.

L’étalement est réalisé par déroulement manuel ou avec un engin de chantier des rouleaux, avec découpage des nappes aux longueurs appropriées.
      • Raccordement

Dans le cas d’une sollicitation considérée comme unidirectionnelle des nappes, le raccordement dans le sens opposé au sens de travail en traction peu se faire :
    • par recouvrement sur au moins 30 cm
    • par couture



Le raccordement des nappes influence le sens de remblaiement futur comme on peu le voir sur ce schéma :



Mise en pré-tension des nappes


Cette opération simple peut-être réalisée par 2 ou 3 ouvriers qui progressent petit à petit de la manière suivante :
    • Positionnement  de la nappe, réglage et compactage de la couche de sol.
    • Mise en pré-tension de la nappe
    • Coincement de la nappe par apport du matériau de remblai
    • Préparation de la couche suivante


Réglage et compactage des couches de sol

Il convient de respecter les règles éditées dans les fascicules de recommandation n°2 et 3 : Recommandations pour les Terrassements Routiers du SETRA ou de créer une planche d’essai de compactage dans le cas ou celles-ci ne suffiraient pas.

Par exemple pour un remblai routier courant, l’obtention de 95% de l’Optimum Proctor lors des terrassements est nécessaire. C’est l’adéquation matériau- compacteur- épaisseur de réglage qui est à résoudre pour cela tout en respectant l’espacement des nappes nécessaire à l’équilibre du massif de sol*.

L’obtention d’une épaisseur de réglage égale à l’espacement entre les nappes est intéressante pour le chantier mais pas toujours réalisable. On se placera alors pour l’épaisseur de compactage vers une valeur sous-multiple de l’espacement entre les nappes de géotextiles, soit en ajustant les paramètres de compactage, soit en ajustant les espacements entre les nappes en vérifiant la stabilité générale du remblai.


Exécution des talus
      • Talus peu inclinés

Ceci concerne les talus dont la pente n’est pas supérieure à l’angle de talus naturel et tan β reste < 1/1.  La principale information est qu’il n’est pas nécessaire de prévoir un dispositif de soutènement pour mettre en œuvre les différentes couches de remblai.

Plusieurs autres conditions s’appliquent aussi :
    • Si tan β > 1/2 on procèdera au repli de la nappe sur le talus pour confiner le remblai.

    • Si tan β ≈ 1 et que le talus doit être végétalisé, il est nécessaire de prévoir dispositif spécial le long de la pente. Pour cela, on utilise souvent un géotextile de parement. Ce géotextile peut servir de support à la terre végétale ou directement de support pour les graines nécessaire à l’engazonnement*.

      • Talus très inclinés ou verticaux

Ceci concerne les talus dont la pente est supérieure à 1/1. Dans ce cas, il est nécessaire de prévoir un dispositif de soutènement pour la construction du talus.

Plusieurs types de coffrage sont envisageables comme :
    • Un coffrage perdu au fur et à l’avancement du remblai de type : merlons de matériau sol, des panneaux en L préfabriqués en béton, des gabions, panneaux préfabriqués avec dispositif d’ancrage des géotextiles, etc…
    • Un coffrage amovible général de type : chaise coffrante réglable, treillis soudé plié à l’inclinaison de la pente, etc…
    • Un coffrage perdu général servant de parement : mur en béton toute hauteur, panneaux préfabriqués bois glissés entre poteaux, blocs en béton, etc…

Les solutions sont à adapter suivant la hauteur du mur pour assurer la stabilité de l’ouvrage. Quelques schémas sont observables ci-dessous.

    • Protection des géotextiles et finitions

Encore une fois, les géotextiles travaillant en tant qu’armatures, leur dégradation éventuelle serait très préjudiciable pour la pérennité de l’ouvrage. Il convient donc d’assurer une protection minimale de toutes les nappes visibles des ouvrages renforcés par géotextiles.

Les exigences concernent essentiellement :
    • le rayonnement solaire
    • la protection mécanique (vandalisme, poinçonnement par chute de pierres…)
    • l’esthétisme du parement

Voici quelques exemples de protections couramment employées sur ces ouvrages :
    • couverture par terre végétale et engazonnement
    • résine ou émulsion de bitume et avec charge minérale
    • seconde nappe de protection
    • éléments préfabriqués tous types de matériaux adaptés à l’usage
    • écran rigide, masque, bardage…

Il est bien sûr intéressant de recouper ces informations avec celles du paragraphe précédent.
Durabilité chimique
Durabilité physico-chimique

Le vieillissement physico-chimique des géotextiles est un domaine complexe particulièrement abordé dans les thèmes de recherche actuels.

Deux paramètres essentiels influencent ce vieillissement qui sont :
    • le milieu dans lequel se trouve le géotextile en service en supposant que les conditions préalables de stockage et de mise en œuvre ont été assurées*
    • la nature de la fibre utilisée dans le géotextile (polyester, polypropylène, aramide, etc..)

Etant données les possibilités de réemploi des sols en place avec les géotextiles de renforcement, les combinaisons entre les sols et les géotextiles sont pratiquement aussi variées que les couches superficielles de sols dans leur état naturel.

Pourtant il existe une grande stabilité physico-chimique de la plupart des polymères utilisés, principalement le polyester et le polypropylène. De plus, les conditions de sol une fois l’ouvrage terminé ne donnent que rarement des ambiances très défavorables en températures, pH, association air et humidité (oxydation), rayonnements solaires, etc…Toute ambiance particulière doit être analysée avant travaux et donner lieu à une étude du comportement des géotextiles dans le cas ou elle pourrait être préjudiciable.

A l’heure actuelle, l’application principale qui pourrait donner lieu à dégradation est la réalisation d’un ouvrage en milieu alcalin par exemple des géotextiles en contacts avec du béton ou les géotextiles utilisés avec des sols traités à la chaux ou dolomitiques. Dans certaines conditions de pH, le géotextile polyester est soumis à une forte réaction d’hydrolyse qui peut faire chuter ses propriétés mécaniques. Les derniers résultats d’études sont présentés dans ce paragraphe.
      • Généralités sur le vieillissement

La notion de durabilité d’un produit ou d’un ouvrage peut être définie de la manière suivante : « durée d’usage au cours de laquelle il devient inapte à sa fonction ».

L’analyse du vieillissement consiste donc à déterminer la courbe de durée de vie d’un produit qui caractérise la diminution d’une de ses fonctions essentielles au cours du temps. Cette courbe permet de fixer les seuils limites à ne pas dépasser.

Pour cela les recherches actuelles s’organisent de la façon suivante :
      • Hydrolyse des géotextiles polyester en milieu alcalin*

L’état des lieux est le suivant :
    • pH < 9, la réaction d’hydrolyse reste faible. L’utilisation des géotextiles en polyester est tout à fait possible en appliquant un coefficient adéquat assurant la sécurité de l’ouvrage.
    • Lorsque pH > 12, la réaction d’hydrolyse est très violente et l’utilisation d’un géotextile en polyester n’est pas envisageable
    • Pour 9 < pH < 12, une étude précise est à envisager pour évaluer la possibilité d’utilisation d’un géotextile polyester.

Elle a pour but de caractériser les modifications
    • Morphologique
    • Chimique
    • Physico-chimique
    • Mécanique

Les essais se déroulent pour 2 valeurs de température 45°C et 75°C et 2 valeurs de pH 9 et 11. A l’image de ce qui a été présenté pour le fluage, les conditions simulent un vieillissement accéléré qui est ensuite interpréter avec la loi d’Arrhenius pour donner des prédictions de durabilité en résistance.

Après un an d’essai, les conclusions sont les suivantes en terme de résistance à la rupture :
    • A pH 9, on obtient une diminution de résistance de 0,25% / an.
    • A pH 11, on obtient une diminution de résistance de 0,4% / an.

Tous les résultats de cette étude ne sont pas connus mais elle pourra servir de base à la rédaction de la norme NF XPG 38064 sur les coefficients partiels de sécurités*. En observant ces premiers résultats, on peut avancer l’hypothèse que pour assurer 100 ans de fiabilité physico-chimique, il conviendra de prendre à pH 9 une marge de sécurité de 25% et à pH 11, une marge de sécurité de 40%.
      • Etude complémentaire sur le contact avec le béton

Le béton frais engendre un pH alcalin supérieur à 12. Cette situation est préjudiciable pour le géotextile polyester car la réaction d’hydrolyse est rapide dans ce cas. Il faut éviter tout contact pour préserver l’intégralité des propriétés physico-chimiques du géotextile polyester et sa durabilité.

Dans la plupart des cas, les géosynthétiques utilisés pour la réalisation de murs de soutènement sont utilisés avec un procédé utilisant des blocs de béton sec, manu- portable et emboîtables. Les géotextiles sont donc en contact d’une peau de béton, dans des conditions d’humidité variables.
Dans ce dernier cas, il n’y a généralement pas de problème de dégradation des géotextiles car pas de pH > 10. Le maximum peut être de 9 à 9,5 en surface des blocs de béton lors de la carbonatation du béton. Ce phénomène nécessite la présence d’humidité et d’air (CO2) à proximité. Il est donc limité dans les sols et n’intervient que lorsque l’humidité est présente. Pour appuyer la très lente évolution de la réaction d’hydrolyse, Texinov à fait réaliser le test suivant.


Conditions des tests

Eprouvettes : 16 cm * 10 cm entourées d’un géotextile polyester sur 1 tour et ½. Le contact se fait ainsi pour avoir une épaisseur de géotextile en contact sur toute la surface et deux épaisseurs sur ¼ de la surface.

Ambiance : sans lumière, 20 à 22°C, 50% d’humidité relative.

Test milieu humide : Les éprouvettes sont humidifiées toutes les quatre heures à l’éponge, volume d’eau de 0,250 litre, soit 4 fois dans la journée à 7 h, 11 h, 15 h, 19 h.

Test en immersion : Les éprouvettes sont en permanence dans l’eau du réseau pH 7,8, dureté 16°F, température 20°C et sorties uniquement pour effectuer les tests.


Evolution du pH en milieu humide

Durée
pH
Départ
8,2
2 semaines
8,2
4 semaines
8,3
6 semaines
8,3
10 semaines
8,3


Evolution du pH en immersion

Durée
pH
2 semaines
7,8
4 semaines
7,84
6 semaines
7,88
10 semaines
7,88


pas d’évolution notable du pH dans ces deux cas.
      • Conclusions sur le vieillissement physico-chimique

Ces études de durabilité physico-chimique montrent que les connaissances dans ce domaine progressent efficacement. On peut dire que l’analyse de la nature des sols qui vont être en contact avec le géotextile est essentielle avant tous travaux.

Les géotextiles polyester sont utilisables sans risques dans une plage de pH variant de 4 à 9. Cette plage de variation représente la plupart des conditions classiques de sol pour les ouvrages de renforcement.

Pour les applications particulières notamment en présence d’un pH alcalin, des tests fiables de durabilités sont en cours pour définir les conditions raisonnables d’application.

La norme NF XPG 38064 en cours d’élaboration prend en compte toutes ces conditions pour définir les coefficients de sécurités applicables à chaque cas d’utilisation.

On peut conclure qu’en cas de doute persistant du client sur la sécurité de son projet vis à vis de l’environnement physico-chimique, il est tout à fait possible d’utiliser un géotextile en polypropylène. Ce polymère a une excellente stabilité chimique et peut être sans danger utilisé pour un chantier même en présence de pH extrêmes.

Comportement dans le temps
Durabilité mécanique

En premier lieu, il convient d’assurer toutes les conditions de stockage et de mise en œuvre préconisées dans le chapitre précédent. En effet, la longévité d’un ouvrage ne peut être envisagée que si les propriétés des matériaux qui le constituent sont conservées et fiables au moment de sa réalisation.
      • complément sur l’essai de traction

La valeur nominale de résistance en traction annoncée doit aussi être fiable. Elle constitue le premier gage de durabilité des produits géotextiles. Pour chaque géotextile, 5 essais sont prévus par la réglementation, la moyenne des tensions ultimes trouvées pour ces 5 essais devant être supérieure à la valeur annoncée, conformément aux exigences de la certification ASQUAL.

Exemple de test

A titre d’exemple voici, les tests effectués sur un des produits standard TEXINOV, le NOTEX GX 07, qui est censé avoir une résistance dans le sens production de 150 kN par mètre. Les courbes obtenues sur les 5 essais + la courbe moyenne sont les suivantes :

L’observation de ces résultats montre bien que la moyenne des essais se trouve au- dessus de la valeur annoncée de 150 kN, de plus, on constate que toutes les courbes sont très proches les unes des autres, la plage des valeurs va de 148 kN à 153 kN, ce qui correspond à une plage relative (PRV) à 96,6%, supérieure à la PRV à 95% prévu par la norme ASQUAL. Ceci montre l’excellente répétitivité de l’essai, et donc la qualité de fabrication des géotextiles Texinov.
Mise en évidence de la très bonne corrélation entre la résistance du fil et celle du géotextile

La technologie de production particulière Texinov permet aux produits de conserver la quasi-totalité de la résistance des fils qui les constituent. Elle assure aussi la répartition de l’effort de traction de manière égale pour tous les câblés de fil . Ainsi lorsque le géotextile est sollicité en traction, il est efficace dès le début de la sollicitation. C’est un net avantage par rapport à des produits concurrents plus classiques qui passent d’abord par une phase pré-tension, pendant laquelle les fils se tendent au sein du géotextile, avant de pouvoir donner la pleine mesure de leur résistance.

Pour montrer cette corrélation entre fils et géotextile, des essais de traction effectués individuellement sur le type de câblé qui constitue le géotextile GX 07 sont présentés sur les courbes suivantes :

D’après les courbes obtenues, on observe des fils d’une résistance d’environ 650 N. Sachant qu’il y a 6 fils sur un pouce de largeur, on a donc environ 236,22 fils sur un mètre, donc une résistance de 236,22*650= 153543 N ce qui équivaut à 153 kN par mètre. Si l’on compare à la valeur de 150 kN annoncée et mesurée pour ce géotextile, l’erreur spécifique est de 2%, donc négligeable. La quasi- totalité de la résistance des fils se retrouve donc bien dans le géotextile.


L’ensemble des processus permettant d’obtenir ces résultats a permis l’obtention de la certification ASQUAL.


Modules sécants

Dans un calcul prenant en compte la compatibilité des déformations, il est nécessaire de définir le module du géotextile. On utilise alors les modules sécants car la courbe non linéaire ne permet pas l’obtention d’un seul module.

La formule du module sécant J se définit comme suit :

Le tableau ci-dessous indique d’une part des valeurs de résistance pour différentes élongations, et d’autre part des valeurs de modules sécants pour également différentes élongations, dans le sens de la longueur.

 
RESISTANCE A DIFFERENTES ELONGATIONS KN/m
Sens longueur

MODULE J SECANT (KN/m)
Sens longueur
 
3%
5%
10%
3%
5%
10%
GX 04 50/50
12
20
45
400
400
450
GX 06 100/50
24
38
88
800
760
880
GX 07  150/50
31
50
115
1000
1000
1150
GX 01  200/50
50
80
180
1660
1600
1800

      • fluage en traction

Le fluage des géosynthétiques est un sujet très abordé dans les thèmes de recherche actuels. C’est un des points clés de la durabilité des ces matériaux à base de polymères.

Le fluage se traduit par l’augmentation avec le temps des déformations d’une éprouvette de matériau soumise à une contrainte constante.

La courbe de fluage typique d’un géotextile se présente comme sur la figure ci- dessous :


On distingue 3 types de comportement du matériau au cours du temps :
    • Une première phase qui fait suite au chargement avec une diminution de la vitesse de fluage
    • Une seconde phase généralement longue vis à vis de la première durant laquelle la vitesse de fluage est constante et qui conduit à une lente déformation au cours du temps.
    • Une dernière phase généralement courte vis à vis de la seconde pour laquelle il y a augmentation de la vitesse de fluage pour atteindre la rupture du matériau.

Le second palier est un point clé du dimensionnement au fluage qui varie en fonction de la nature chimique du géotextile, du degré de polymérisation du polymère utilisé, etc…







Approche analytique

La déformation de fluage peut être associée à un modèle rhéologique de type visco- élastique tel un amortisseur de suspension de voiture soit l’association d’un comportement élastique


avec un comportement visqueux (linéaire ou non) 


pour donner un modèle visco-élastique de type


Ce dernier modèle est particulièrement intéressant car il décrit bien les trois étapes du fluage tel qu’indiqué sur la courbe ci-dessus, la première réponse quasi-élastique modélisée par un ressort, la seconde phase visco-élastique de fluage sur la durée (modèle en parallèle de Kelvin-Voigt) et la dernière phase d’écoulement visqueux avant la rupture.

La détermination de la loi de fluage passe part le choix des bonnes conditions à la limite et les associations en série et en parallèle des modèles de base pour donner la relation finale avec le modèle de Burger :


Approche expérimentale


La norme concernant le test de fluage est la NF EN ISO 13341.

Le principe de l’essai est simple. Il se déroule sous atmosphère normalisée sur des éprouvettes de géotextiles de dimensions 200 mm * 50 mm. On doit veiller lors de la découpe des éprouvettes à conserver en proportion adéquate  les câblés de fils nécessaires pour reprendre l’effort de traction dans les même conditions que la résistance par mètre donnée par les fabricants. La charge qui peut être appliquée sous la forme d’un poids ou d’un système de leviers est maintenue pendant 1000 heures pour l’essai de référence mais cette durée peut être étendue. Cette charge correspond à un pourcentage de la limite de rupture en traction du géotextile. 4 valeurs sont choisies par le producteur entre les pourcentages : 5, 10, 20, 30, 40, 50, 60. Les durées prévues entre les mesures, les appareils nécessaires et le principe de la mesure sont détaillés dans la norme. Les résultats essentiels à fournir sont ceux du tableau suivant :


Détermination du comportement au fluage en traction
(EN ISO 13431)
 
 
 
 
Niveau de charge (1)
e 100h (%)
e 1000h (%)
trupture (2)
 
(%)
 
 
 
 
(%)
 
 
 
 
(%)
 
 
 
 
(%)
 
 
 
 
(1) les quatre niveaux de charge doivent être choisis parmi ceux définis dans la norme EN ISO 13431
 
(2) temps de rupture si celle-ci se produit avant la fin de l'essai
 


Ce protocole est normalisé mais il n’existe pas de norme sur l’interprétation des résultats et le dimensionnement au fluage. La NF XP G 38064 est en cours pour permettre de définir le coefficient de sécurité nécessaire au dimensionnement sécuritaire d’un ouvrage renforcé par géotextiles. Elle compte s’appuyer sur les résultats des tests de fluage.

Les modèles présentés dans l’approche analytique sont à la base de l’interprétation des courbes. L’équation de modélisation des courbes n’est pas forcément celle de Burger, elle peut-être plus simple, bien souvent, elle est de la forme :

Déformation totale = déformation initiale + constante en fonction du temps par exemple :

équation linéaire

La linéarité ne s’applique pas à tous les matériaux d’autres modélisations ont été expérimentées comme par exemple :
loi exponentielle

L’autre manière d’aborder l’interprétation des tests pour le dimensionnement est de travailler avec la décroissance de l’effort mobilisable au cours du temps. Cette solution intéresse particulièrement les concepteurs qui analysent aussi bien les états limites de déformation que les états limites de résistance des ouvrages.

La courbe souhaitée se présente de la manière suivante :


L’échelle logarithmique est nécessaire pour regrouper sur le même graphe de manière précise des points de mesure allant de quelques heures à une centaine d’années, durée de vie préconisée pour les ouvrages de génie civil de nos jours.


Approche expérimentale : le  vieillissement accéléré

Pour pouvoir prédire des durées de vie d’une telle ampleur, il faudrait avoir les résultats de tests de fluage pendant des durées équivalentes. Il n’est pas envisageable d’attendre 100 années et pour bénéficier au plus tôt de ces informations, des tests de vieillissement accéléré sont en cours.

Le comportement visco-élastique des polymères présenté ci-dessus est essentiel pour les méthodes de vieillissement accéléré. L’effet de la température influence le comportement rhéologique du matériau et notamment un accroissement de température accélère le comportement de fluage.

La méthode référence actuellement utilisée est la méthode SIM (Stepped Isothermal Method). Elle est basée sur la superposition des déformations temps- température selon les principes de Boltzmann (1872) et Williams Landel et Ferry (1955). L’éprouvette est soumise à une contrainte de fluage constante sous une température de référence. L’augmentation pallier par pallier de cette température induit une succession de déformations supplémentaires mesurable. On fait correspondre à chaque pallier de température un allongement de la durée du chargement de fluage. L’interprétation de ces résultats à l’aide d’une loi de type Arrhenius permet de prédire durée de vie à long terme des géotextiles. Il existe actuellement une bonne concordance entre le vieillissement accéléré et les méthodes conventionnelles.

Test de fluage en cours

Tps (h)
20% of tensile strength
40% of tensile strength
60% of tensile strength
10% of tensile strength
30% of tensile strength
50% of tensile strength
60% of tensile strength
0,016
2,37
5,19
7,31
0,77
3,78
6,27
5,09
0,033
2,42
5,23
7,34
0,77
3,81
6,30
5,11
0,1
2,50
5,29
7,38
0,80
3,88
6,34
5,13
0,2
2,55
5,31
7,41
0,83
3,92
6,36
5,19
0,35
2,58
5,33
7,44
0,85
3,94
6,39
5,20
0,5
2,60
5,34
7,46
0,87
3,95
6,40
5,21
0,75
2,63
5,36
7,48
0,89
3,97
6,42
5,21
1
2,64
5,38
7,49
0,90
3,97
6,43
5,22
2,5
2,69
5,40
7,52
0,95
4,02
6,47
5,28
5
2,73
5,42
7,55
1,00
4,05
6,48
5,29
10
2,76
5,45
7,57
1,05
4,07
6,50
5,30
20
2,78
5,46
7,60
1,08
4,10
6,53
5,31
40
2,81
5,49
7,62
1,13
4,11
6,55
5,33
60
2,82
5,50
7,65
1,16
4,12
6,55
5,34
80
2,83
5,50
7,65
1,17
4,13
6,57
5,35
100
2,85
5,50
7,66
1,19
4,13
6,57
5,36
200
2,87
5,52
7,69
1,23
4,16
6,61
5,37
400
2,89
5,54
7,73
1,28
4,17
6,64
5,39
600
2,92
5,56
7,75
1,30
4,19
6,64
5,39
800
2,93
5,56
7,77
1,31
4,19
6,65
5,41
1000
2,93
5,57
7,78
1,32
4,20
6,67
5,41





5. Sujet principal
6. Calculs
Les matériaux
Sol de fondation

Il est nécessaire d’évaluer la stabilité externe de l’ouvrage et donc la qualité du sol sur lequel il va être fondé. Pour cela, on doit faire réaliser une étude géotechnique classique à l’image des autres ouvrages en terre (sondages, géologie, études, travaux antérieurs…).

Matériaux de remblai

L’un des principaux intérêts des ouvrages renforcés par géotextiles est la possibilité de réutiliser en remblai les matériaux de déblai dans la majeure partie des cas en respectant les Recommandations pour les Terrassements Routiers (RTR) du SETRA, LCPC.

Pour cela, il convient de préciser les caractéristiques suivantes :
      • Propriétés intrinsèques des sols

Ce sont les paramètres permettant d’identifier la nature et l’état du matériau sol tels que la granulométrie, l’indice de plasticité, la teneur en eau, etc...
      • Poids volumique sec apparent

L’essai Proctor Normal, donne la densité sèche maximale du sol. Pour les sols fins humides, on détermine avec le même essai la densité à teneur en eau réelle. Le poids volumique intervient pour connaître notamment la résistance au cisaillement, le poids des terres ou le frottement sol-géotextile.
      • Potentiel hydrogène

La fourchette classique des pH des sols est 6<pH<9. Dans le cas de pH différents, il faudra choisir un polymère adéquat pour limiter la dégradation du géotextile.
      • Cohésion et angle de frottement

Dans le cas des matériaux non ou peu cohérents, on utilise les caractéristiques à long terme c’ (cohésion) et φ’ (angle de frottement interne), aux densités sèche de mise en œuvre et saturée. Pour les matériaux cohérents, on utilise cu et φu à court terme à la densité sèche de mise en œuvre et à la teneur en eau la plus défavorable prévisible sur chantier.
      • Compressibilité

Elle est à connaître dans le cas de matériaux fins suffisamment humides pouvant générer des pressions interstitielles et des tassements de consolidation sous l’effet du poids propre ou des surcharges du projet. On utilise alors la courbe œdométrique du matériau.

Les géotextiles

Les géotextiles utilisés dans le renforcement sont des armatures qui assurent la stabilité des remblais. Leurs caractéristiques descriptives, mécaniques et hydrauliques doivent être clairement identifiées. En outre, les caractéristiques concernées par le marquage CE* des produits géotextiles sont obligatoires. Certaines autres peuvent être demandées par la maîtrise d’œuvre pour des applications particulières. Les paragraphes ci-dessous résument les principales caractéristiques employées dans le cas des seuls renforcements.
      • Caractéristiques descriptives*

Caractéristique
Unité
Norme
Marquage CE
Masse surfacique
g/m²
NF EN 964-1
oui
Epaisseur
mm
NF EN ISO 9864
oui
Porosité
%
 
non
      • Caractéristiques mécaniques*

Caractéristique
Unité
Norme
Marquage CE
Résistance ultime à la traction
kN/m
NF EN ISO 10319
oui
Résistance à la traction à 2% de déformation
kN/m
NF EN ISO 10319
non
Résistance à la traction à 3% de déformation
kN/m
NF EN ISO 10319
non
Résistance à la traction à 5% de déformation
kN/m
NF EN ISO 10319
oui
Déformation à l’effort de traction maximal
%
NF EN ISO 10319
oui
Frottement sol- géotextile
 
pr EN ISO 12957-1
non
Module sécant d’élongation
kN/m
NF EN ISO 10319
oui
Poinçonnement statique CBR
kN
NF EN 12936
oui
Perforation dynamique
mm
NF EN 918
oui
Poinçonnement
kN
NF G 38-019
NR

NR = Non Requis pour l’application unique de renforcement
D’autres tests peuvent aussi être envisagés ayant un impact sur la mise en œuvre telle que la résistance à la déchirure, la souplesse, le fluage. Ce dernier est un paramètre activement étudié à l’heure actuelle et qui sera intégré au marquage CE dès que possible. Il est toutefois envisageable de prescrire des tests en se basant sur les normes : NF G 38125 et pr EN ISO 13431*.
      • Caractéristiques hydrauliques**

Caractéristique
Unité
Norme
Marquage CE
Perméabilité
m/s
NF EN ISO 11058
NR
Ouverture de filtration
μm
NF EN ISO 12956
NR
Capacité de débit dans leur plan
m²/s
NF EN ISO 12958
NR

NR = Non Requis pour l’application unique de renforcement
      • Interaction sol-géotextile

Ce sont les paramètres de frottement et/ou d’adhérence entre le sol et le géotextile qui permettent de mobiliser un effort de traction dans les nappes*.

La procédure envisagée pour les déterminer est présentée dans la norme pr EN ISO 12957-1. Il s’agit d’un essai de cisaillement direct modifié à la boîte de Casagrande**.

L’essai permet de déterminer la cohésion et l’angle de frottement interne entre le sol et le géotextile.
    • Dans le cas du dimensionnement à long terme, on réalisera un essai en régime drainé, à la densité du sol prévisible sur chantier pour connaître c’sol-géo et φ’sol-géo.
    • Dans le cas du dimensionnement à court terme, on travaillera en régime non drainé pour connaître cusol-géo et φusol-géo.
    • Dans le cas de petits projets, en l’absence d’essais, on peut utiliser la relation suivante : tan φ’sol-géo / tan φ’ = 2/3***.


Stabilité externe
Stabilité externe d’un ouvrage

Les remblais en terre renforcés par géotextiles sont classés dans la catégorie des murs autostables, c’est à dire des ouvrages qui résistent à la poussée des terres sous leur propre poids. On considère le massif comme un bloc dont les dimensions sont définies par la présence des armatures géotextiles qui peuvent être de longueur variable.

La vérification de la stabilité générale du massif doit s’effectuer conformément au fascicule 62-Titre V et au D.T.U. 13-12 sur les fondations superficielles.

Il existe différentes méthodes pour vérifier chaque cas de stabilité qui sera présenté ci-dessous (Meyerhof, contrainte aux ¾, à partir d’un essai pressiométrique, etc…). La suite de ce paragraphe donne quelques principes de dimensionnement. Il s'agit d’une notice informative et explicative à qui n’a aucune valeur normative.

Les 4 modes de rupture possibles sont :
    • Renversement
    • Poinçonnement
    • Glissement
    • Stabilité d’ensemble

      • Stabilité au renversement

Il convient de déterminer la répartition des contraintes sous l’ouvrage en terre. On doit vérifier à l’E.L.U., que le sol comprimé sous l’ouvrage soit au moins égal à 10% de sa surface.
      • Stabilité du sol de fondation

Par exemple, avec la méthode Meyerhof on travaille à l’E.L.U. combinaisons fondamentales et accidentelles et à l’E.L.S. combinaisons rares. Ces conditions permettent de garantir la stabilité du sol sous l’ouvrage renforcé pour éviter la ruine et de vérifier la compatibilité des déformations entre l’ouvrage et son sol de fondation.

La contrainte de référence s’exprime par la relation :

(Pa)

Il faut alors vérifier l’inéquation suivante :

  avec : γq=2 à l’E.L.U. et γq=3 à l’E.L.S*.

La partie gauche de l’inéquation correspond à la sollicitation et la partie droite à la capacité portante du sol de fondation.

q'o est la contrainte effective la plus faible au niveau du sol de fondation.

(Pa)

Il y a une influence d’un calcul court terme ou long terme et de φ’ sur la détermination des facteurs de portance (Ni), coefficients de forme (si) et coefficients de Meyerhof (ii). Ces coefficients sont exprimés dans le DTU 13-1.
      • Etat limite de décompression du sol

La vérification s’effectue sous combinaisons E.L.S. rares et fréquentes. Elle exprime le fait qu’une dissymétrie trop importante des contraintes sous la semelle puisse entraîner un tassement plus important du bord aval de celle-ci, plus sollicité que le bord amont.

Ceci contribue à augmenter l’excentricité et donc accélérer le basculement du mur. On doit vérifier que :
    • sous combinaisons fréquentes, le sol reste entièrement comprimé.
    • sous combinaisons rares, la surface du sol comprimé sous la fondation soit supérieure à 75% de la surface totale de la fondation.


Remarque : On verra dans les paragraphes 2.3. et 2.4. comment limiter l’effet de poinçonnement en interposant un ou plusieurs lits de géotextiles en bas de remblai.
      • Stabilité au glissement

C’est une vérification qui s’opère à l’E.L.U.

Il faut vérifier la relation suivante :




γg1 = 1,2 et γg2 = 1,5 sous combinaisons fondamentales*.



Remarque : on verra au paragraphe 2.2.4 comment étudier le frottement entre un géotextile et le sol dans le cas ou le géotextile serait appliqué le long de la ligne de glissement.
      • Stabilité d’ensemble ou grand glissement

La vérification de la stabilité d’ensemble se fait par les méthodes de calcul à la rupture de la mécanique des sols. Il s’agit de modéliser la rupture probable par détachement complet de l’ouvrage en suivant une surface de glissement privilégiée.

Cette surface de glissement n’est pas connue à l’avance et peut être modélisée sous différentes formes (circulaires, non circulaires, en coins, polynôme, etc…). Le principe du calcul est d’en modéliser un nombre suffisant et de retenir celle qui apporte le plus petit coefficient de sécurité, en vérifiant qu’il respecte la valeur minimale normative nécessaire.

Le calcul ne doit pas être fait à l’aveugle. Les sorties graphiques doivent permettre de valider la rupture retenue et l’ingénieur doit juger si cette rupture est plausible.

Quand la surface de rupture coupe quelques géotextiles, on peut se reporter au paragraphe 2.2.4.
Stabilité interne
Stabilité interne d’un massif renforcé
      • Stabilité du parement

Le massif renforcé par géotextiles nécessite souvent la mise en place d’un parement, notamment pour la protection des armatures qui sont susceptibles d’être détériorées* (U.V., vandalisme, etc…). La stabilité de cette partie de l’ouvrage doit être établie à la construction et pendant toute la durée de vie de l’ouvrage en suivant les dimensionnements règlementaires applicable à chaque cas (par exemple pour un mur en béton armé, on se réferera à l’EUROCODE 2).
      • Surface de rupture

La vérification de la stabilité interne du mur est aussi menée par les méthodes de calcul des surfaces de glissement potentiel comme expliqué au paragraphe précédent. Dans ce cas, on ne vérifie pas de ruptures de grand glissement, mais des surfaces de rupture qui coupent directement l’intérieur du remblai renforcé.

On peut travailler avec différentes formes de surfaces de rupture, circulaires ou non. Il est toutefois important de vérifier les surfaces qui viennent tangenter les lits de géotextile et de procéder à l’analyse nombreuses ruptures potentielles. Les particularités de déformation des ouvrages en terre renforcés par géotextiles n’ont pas encore fait l’objet de normes spécifiques c’est pour cela qu’il faut donc être vigilant sur le nombre de ruptures à envisager.

La vérification s’opère à l’E.L.U. en combinaisons fondamentales. Les méthodes de calcul à la rupture sont nombreuses (Fellenius, coin de coulomb, méthode des perturbations, etc…) et ont toutes leur validité confirmée. A titre d’exemple, il sera abordé dans la suite de ce paragraphe la méthode de Bishop qui, de part son utilisation très fréquente dans le milieu du génie civil, est une méthode référence.
    
      • La méthode de Bishop (1955)

La méthode de Bishop consiste en un découpage du massif en un nombre fini de tranches, le long de la surface de rupture. On évalue l’équilibre de chaque tranche et l’on somme sur le nombre de tranche pour déterminer l’équilibre global du massif et le coefficient de sécurité qui traduit cet équilibre.


Hypothèses communes des méthodes à la rupture
    • La rupture peut être étudiée dans un plan (analyse bidimensionnelle d’un talus infini).
    • Les forces extérieures d'entraînement sont le poids et les surcharges.
    • Le problème est statique.
    • Les lois de la mécanique des milieux continus s'appliquent au sol.
    • Le déplacement du sol est rigide et c’est pourquoi la courbe de rupture est de "bonne allure".
    • La relation de Terzaghi est vraie : s ’ = s - u.
    • La loi de Coulomb s'applique à la rupture : t = c’ + (s - u) tan j '.
    • Un coefficient de sécurité est défini comme le rapport de la contrainte de cisaillement maximale mobilisable à celle nécessaire à l’équilibre du sol.
    • Le coefficient de sécurité est constant le long de la courbe de rupture.


Notations
    • Découpage en tranches verticales


Pour une tranche d’indice i, on connaît l’angle d’inclinaison de la surface de rupture et la largeur de la tranche.


    • Eléments d’une tranche ou notation des paramètres définissant l’équilibre d’une tranche.

 
V et V’ : efforts de liaison intertranche verticaux (N)
H et H’ : efforts de liaison intertranche horizontaux (N)
Y et y’, bras de levier (m)
W : poids de la tranche (N)
T : effort tangentiel de frottement sur la surface de rupture (N)
N : effort normal sur la surface de rupture




Application de la méthode de Bishop
Hypothèse spécifique : la résultante verticale des forces intertranches est nulle.
La méthode de Bishop simplifiée est la plus utilisée des méthodes de calcul en rupture circulaire. Bien qu’elle possède un certain nombre d’imperfections son grand usage lui confère un statut de méthode de référence.

On considère une tranche verticale de sol soumise à l’action de ses voisines, celles- ci n’ayant qu’une action horizontale, et aux forces normales et de cisaillement centrées à la base de la tranche. 

La construction du funiculaire des forces appliquées à cette tranche permet d’écrire l’équilibre vertical qui fournit une expression de la force à la base de la tranche : l.


(N)

On considère maintenant une surface de rupture circulaire pour écrire l’équilibre global du bloc de sol soumis à cette rupture. Le coefficient de sécurité F est donné par :

Le moment moteur, est du au poids des terres, et a pour expression :
  (N.m) avec R rayon du cercle de rupture

Le moment résistant ne correspond qu’aux forces de cisaillement à la rupture, on utilise donc la loi de coulomb pour obtenir l’expression suivante :
   (N.m)
En développant on trouve :
   ou  

L’expression du coefficient de sécurité montre que le procédé est itératif puisque F apparaît dans les deux membres de l’expression. La convergence est rapide quand F0, première valeur de F dans le processus itératif, est pris égal à FFellenius. Ce coefficient de sécurité est calculé par la méthode de Fellenius (1927). Il résulte de l’équilibre vertical des tranches en considérant les efforts intertranches nuls et le critère de rupture de coulomb.

Prendre F0 = constante (1 par exemple) peut faire converger le processus vers une valeur erronée de F, la courbe F = f(F) possédant plusieurs asymptotes dans le cas de sols frottants.

L’expression de la contrainte de Bishop s’obtient à partir des équations précédentes et s’écrit :
     (Pa)

Remarque : Si F>1,5 on admet, dans la plupart des cas, que cette valeur est suffisante pour qualifier l’ouvrage de stable. Etant donné l’expression du coefficient de sécurité Moment résistant / Moment moteur, F=1 indique un équilibre parfait des efforts, donc une sécurité nulle pour la vie de l’ouvrage.

      • Prise en compte des géotextiles

Cercles de rupture


Les géotextiles sont mis en œuvre à plat, et travaillent uniquement en traction dans la direction des fibres.


Interactions sol-géotextile

Lorsque l’on réalise un remblai avec inclusions de géotextiles on forme un mélange intime entre les nappes de géotextiles et le sol.

Le géotextile se retrouve « coincé » par la contrainte exercée par le poids des terres situées au-dessus de lui.


C’est le frottement avec le sol de la partie gauche (zone passive) qui permet de maintenir en équilibre le massif qui veut se détacher. A droite, dans la partie en mouvement, une longueur minimale d’ancrage est nécessaire sauf si le géotextile est solidaire du parement.

Pour connaître les valeurs d’effort mobilisable, il faut connaître la valeur du coefficient de frottement entre le géotextile et le sol*.

On a alors l’effort par la simple relation

  par mètre linéaire dans la profondeur du remblai**.
      • σh est la contrainte normale à la profondeur h.
      • φ est l’angle de frottement sol-géotextile.
      • Lancrage est la longueur d’ancrage du géotextile, en générale 2 fois la longueur du géotextile au dela (à gauche) de la ligne de rupture, car 2 zones de frottement (supérieure et inférieure).

L’ancrage n’est mobilisable que s’il se fait sur une longueur minimale en dessous de laquelle il n’est pas assez satisfaisant pour empêcher un glissement direct de la nappe.


Insertion dans la méthode de Bishop

L’effort mobilisable stabilisateur des géotextiles est pris en compte comme un effort tangentiel résistant. Il s’ajoute simplement à l’effort tangentiel mobilisable à la rupture pour le calcul du coefficient de sécurité défini ci-dessus dans la méthode de Bishop.


L’espacement entre les géotextiles, le type de géotextile utilisé et la longueur des géotextiles sont autant de paramètres qui peuvent être utilisés par le concepteur pour assurer l’équilibre d’un massif de sol.

Il existe donc une très forte influence des armatures géotextiles sur la stabilité du massif en terre et sur le coefficient de sécurité que l’on peut obtenir.
Dans le cas de déformations importantes, le comportement local du géotextile le long de la surface de rupture s’apparente plus à celui présenté ci-dessous :


On remarque une inclinaison du géotextile et donc une direction de l’effort différente de l’horizontale comme indiqué dans le calcul ci-avant. On pourra alors :
    • soit conserver l’hypothèse que l’effort est horizontal, en restant dans le sens de la sécurité puisque la projection de l’effort est inférieure dans ce cas
    • soit prendre une inclinaison de l’effort égale à l’inclinaison de la surface de rupture, sachant que cette hypothèse s’applique plus volontiers aux ouvrages pour lesquels on tolère de grandes déformations.
      • Approche multicritère

Une approche multicritère va permettre de définir les efforts dont les géotextiles sont capables, en terme de rupture comme de déformations. Ces états limites sont à considérer avec les coefficients partiels et globaux de sécurité réglementaires sur les charges, matériaux et méthodes utilisés.

Il y a 4 critères de rupture :

Critère de rupture par glissement de la nappe de géotextile

L’ancrage exprimé ci-avant est un peu analogue à la notion d’ancrage ou de scellement en béton armé.

Il faut s’assurer que la longueur d’ancrage choisie pour les géotextiles dans le projet sera suffisante pour assurer la stabilité du massif. Cette vérification est nécessaire aussi bien dans la zone active que dans la zone passive, sauf dans le cas d’un parement adapté du côté actif, (Leromur par exemple) avec coincement du géotextile.


Dans tous les cas, il faudra vérifier que la longueur des nappes respecte une longueur minimale dite : « longueur limite ».  Elle correspond à la longueur nécessaire pour que l’effet de frottement puisse être pris en compte. Sinon, le géotextile risque de glisser directement. Cette longueur résulte de l’interpolation de l’essai à la boîte de cisaillement ainsi que d’essais en vraie grandeur destinés à mieux connaître le comportement d’ancrage des nappes de géotextiles*.




Critère de rupture par défaut de résistance du géotextile

Le second critère de rupture est la rupture en traction du géotextile. Si le géotextile est bien ancré, il est possible que le critère de rupture devienne plus défavorable que le glissement de la nappe. Les valeurs de ruptures résultent d’essais de tractions**. Il convient de minorer ces valeurs en utilisant les coefficients partiels de sécurité réglementaires nécessaires, qui permettent de définir la résistance admissible d’un géotextile. On compare simplement l’effort sollicitant à cette résistance admissible. Le concepteur et l’équipe de pose apporteront une attention particulière au sens de travail du géotextile, repéré par les fabricants, car certains produits peuvent avoir des résistances différentes dans les deux directions de leur plan.



Limites de déformations

Il convient aussi de vérifier la compatibilité des déformations avec les données du projet.

La loi de déformation du géotextile dans son domaine élastique est la suivante :

Fgeo (kN/m) = J (raideur en kN/m) * déformation

En couplant cette loi avec la loi de mobilisation de l’effort de contact sol- géotextile, il est possible d’évaluer les déformations locales au niveau du géotextile, le long de la ligne de rupture.

En général, les limites de déformations données par les maîtres d’ouvrage sont des limites globales sur l’ensemble de l’ouvrage, par exemple le déplacement admissible en tête de remblai. On peut procéder à 2 cinématiques différentes pour respecter ces conditions.
    • A partir des déplacements locaux sous chargement adéquat pour chaque géotextile, on évalue les déplacements horizontaux et verticaux globaux en tête de remblai et on vérifie que ceux-ci restent dans les limites demandées
    • On impose le déplacement limite demandé et on trouve le déplacement limite local au droit de chaque nappe nécessaire pour respecter ce critère. On peut alors vérifier sous le chargement adéquat qu’à chaque nappe la valeur trouvée reste inférieure à la valeur limite.



Remarque : ces vérifications de déformations s’effectuent à l’instant « t » or on sait que le fluage et l’altération physico-chimique à long terme existent. Il faut en conséquence se réserver un marge de sécurité appropriée. Aujourd’hui, les ingénieurs et chercheurs utilisent des marges déjà acquisent par l’expérience et travaillent à la définition des ouvrages et des produits pour réaliser des approches de dimensionnement incluant le fluage et la durabilité de manière plus précise. Le prochain chapitre parlera de ces problèmes.


Cas des fontis
Renforcements sur sols mous et sols à risques d’effondrements

Etant donné les capacités de grandes déformations à la rupture des géotextiles, il est possible d’exploiter cette particularité pour des applications intéressantes.

Deux applications principales se dégagent :
    • la réalisation d’un radier en sol renforcé pour supporter un remblai sur sol compressible
    • l’interposition d’un géotextile « parachute » pour soutenir un ouvrage fondé sur sol karstique ou à cavités potentielles non repérées

Dans le cas de l’interposition d’un (ou plusieurs) géotextile entre le sol compressible et le remblai général, le géotextile permet de maîtriser tassements, poinçonnements et cisaillements dans le remblai. Il peut avoir notamment l’avantage de diminuer les durées d’attente lors de la consolidation progressive des sols mous ou aussi d’éviter la mise en œuvre de travaux très lourds comme les colonnes ballastées, les pieux, etc…

En ce qui concerne les vides potentiels sous ouvrages, les nappes de géotextiles au dessus d’une cavité permettent, grâce à leur fonctionnement en membrane, d’éviter une rupture brutale, voire de maintenir un niveau minimal de service à l’apparition d’un fontis.

Le calcul des armatures géotextiles est donc à adapter aux grandes déformations. Il s’agit ici, de proposer quelques principes permettant de procéder au dimensionnement de ces ouvrages.
      • La stabilité latérale

La stabilité latérale s’étudie par analogie avec les solutions proposées dans le paragraphe 2.1. La rupture peut être des formes suivantes :
      • Stabilité au poinçonement

Remblai sur sol mou 

Cette application spécifique concerne le cas où la stabilité au poinçonnement mentionée dans le paragraphe 2.1. (sol de fondation et décompression) ne peut pas être assurée par le sol mou de fondation, jusqu'à obtention de son tassement final. Le remblai se comporte alors de la façon suivante :


Le radier peut être effectué à l’aide de plusieurs couches de géotextiles. Ces couches participent aussi à la stabilisation enoncée dans les paragraphes 2.1 et 2.2. Ceci qui peut être un avantage pour le concepteur qui concilie deux effets simultanés de renforcement.

Remblai sur fontis 



La présence de cavités peut être d’origine naturelle (dissolution de matériaux de type, calcaire, craie, gypse…) ou artificielle (galerie d’exploitations, galeries militaires…). Il existe des cartes géologiques repérant ces ouvrages mais elles ne peuvent malheureusement pas être exhaustives.

Le repérage de ces cavités est possible par différentes techniques comme la sismique réfraction, la gravimétrie, l’utilisation de champs électriques ou magnétiques. Ces techniques sont toutefois coûteuses à mettre en œuvre.
Une fois la cavité repérée, son traitement par injection d’un coulis de ciment engendre des coûts encore plus importants que ceux de la détection, allant jusqu’à être le point déterminant du chantier.

De plus, l’injection et le repérage ne sont pas toujours précis. Ils peuvent donner lieu à des problèmes importants, voire même dangereux sur chantier lors des terrassements comme la découverte de nouvelles cavités ou de cavités mal injectées.

Suivant le risque géologique de fontis, il peut être très intéressant d’utiliser un géotextile sous les ouvrages, en prévision de ces phénomènes. Le géotextile garanti la sécurité de l’ouvrage touché par un effondrement grâce à son effet « parachute ». La cavité est injectée à postériori. Ceci permet de cibler les fontis à leur apparition, donc d’économiser par rapport à une injection massive aléatoire avant le chantier.
      • Comportement du géotextile de renforcement

Le géotextile se déforme comme une membrane et travaille donc uniquement en traction. En grandes déformations, on ne peut plu faire l’hypothèse de nappes horizontales, il est donc nécessaire d’évaluer la flèche prise par le géotextile pour pouvoir prendre en compte l’inclinaison de l’effort repris par le géotextile.

Pour ce qui est du remblai sur sol mou, on peut se reporter au paragraphe 2.1. 2.2. et 2.3. pour avoir quelques indications sur les méthodes de dimensionnements.

En ce qui concerne les remblais sur cavités potentiels, des développements sont en cours pour modéliser de mieux en mieux le comportement du géotextile et de ses ancrages. Différentes méthodes intéressantes ont déjà été mises élaborées telles que : le modèle de Giroud (1995), la norme anglaise BS 8006, la méthode du programme RAFAEL, les modèles d’ancrages Briançon et Villard (2006), etc…

Voici un exemple de modélisation de ce type d’ouvrages :

graphic

Tmax = tension reprise par le géotextile
dg = flèche de la membrane géotextile


Toute la complexité de ces problèmes réside dans la différence de comportement des sols lors d’un effondrement (argiles traitées, sols pulvérulents…) et la difficulté d’évaluer les ancrages ainsi que le chargement de la nappe. Les dernières orientations prises peuvent être résumées par le schéma suivant :



Le point particulièrement intéressant de ces géotextiles est qu’ils assurent un service minimum à la rupture de la cavité. Mais tant que l’effondrement n’est pas survenu, ils fonctionnent comme un renforcement classique explicité dans les paragraphes précédents.

Pour répondre à ces deux attentes, Texinov produit des géotextiles bi-module contenant :
    • Des fils de renfort très rigides à base de fibres d’aramide
    • Des fils de renfort plus déformables en polypropylène ou polyester


Pour conclure sur cette partie, on peut ajouter que l’analyse de ces cas complexes de dimensionnement se fait de plus en plus de manière assistée par ordinateur, et notamment avec une approche aux éléments finis. La connaissance du contact entre les sols en jeu et le géotextile est primordiale dans ce cas.