Ce premier cas
présenté est un exemple très connu de glissement de
terrain qui est apparu dans la recharge amont du barrage de Lower
San Fernando lors du tremblement de terre du 9 février 1971.
Ce glissement de terrain, a entraîné comme mesure de
précaution l'évacuation de quelques 80 000 personnes, et
a frappé l'opinion publique en soulevant de nombreuses
questions sur la validité des procédures d’alors
pour la construction et la détermination de la stabilité
des structures. C'est pour ces raisons que de nombreuses
études ont été publiées afin d'examiner
minutieusement le sujet.
Coupe du
barrage de San Fernando.
Avant 1970, les
analyses de stabilité des talus soumis à des tremblements
de terre étaient conventionnellement effectuées à
l'aide de méthodes pseudo-statiques. Pour le barrage de Lower
San Fernando, de telles analyses, employées avec un
coefficient sismique de 0.15, ont conduit à des coefficients
de sécurité allant de 1.22 à 1.61 (Seed et al.
1975), ce qui indiquait un risque très faible de glissement de
terrain dans ce barrage. C'est pourquoi, après
l’événement, il est apparu important d'envisager
l'application des méthodes d'analyse dynamique,
développées peu de temps auparavant (Newmark 1966, Seed
1965). Cela marqua le début d'un certain
désintéressement pour les méthodes pseudo-statiques.
Ce cas a servi à de nombreuses études dont les principaux
résultats de ces études sont les suivants.
Le barrage de Lower
San Fernando repose sur des alluvions récentes
constituées d'argile raide et de lentilles de sable et
gravier. La construction du barrage a débuté en 1912 et
il fut surélevé à trois reprises en 1916, 1924 et
1930. Ainsi achevé, il peut être décrit comme un
talus de sable hydraulique et "a potpourri of wagon-dumped and
rolled fills". La pente de la recharge amont est de 2,5:1, la
hauteur est de 43 m et la largeur de crête de 6 m. Il a
été recouvert en surface par du béton.
Le séisme de
San Fernando a atteint une magnitude de 6.6 sur l'échelle de
Richter. Une étude réalisée par Scott (1973) a
montré que l'accélération maximum du sol n'a sans
doute pas dépassé 0.55 à 0.60g. Duke et al. (1972)
avaient indiqué que l'accélération maximum à la
base rocheuse du site du barrage était d'environ 0.5g sans
amplification significative entre le rocher et la crête du
barrage.
Un programme complet
d'essais in situ et d'essais en laboratoire a été
entrepris afin de déterminer les caractéristiques du
terrain (étude granulométrique, densités in situ,
densités minimum et maximum, densités relatives,
degré de compactage, paramètres de résistance,
génération de pressions interstitielles, relation
contrainte- déformation, et déformations pour les essais
cycliques). Les résultats obtenus grâce à des essais
de compression triaxiale non drainée ont montré une
considérable dispersion des données. Cependant il est
possible de dégager une limite inférieure aux
paramètres de résistance et une ligne moyenne à
travers l'ensemble de ces points. Les paramètres de
résistance du sol sont les suivants :
Valeur
conservative c' =
57.5kN/m², j‘ = 20°
Valeur moyenne : c' =
97.7kN/m², j‘ = 19°
Le poids volumique sec varie entre 16
et 18 kN/m3.
Des essais de
chargement cycliques ont également été
réalisés afin de déterminer la résistance
cyclique du sol.
L'étude
pseudo-statique de stabilité a été reprise en
utilisant la même schématisation de la
géométrie du barrage et les caractéristiques du sol
employées par Seed et al. en 1975 (Fig. 5 - 12). La
méthode appliquée est la méthode des perturbations.
Avec les valeurs moyennes des paramètres du sol c' =
97.7kN/m², j‘ = 19° , g = 17kN/m3 et avec un coefficient sismique de 0.15
dans tout le barrage, le coefficient de sécurité vaut
1.40 alors que les calculs pseudo-statiques antérieurs avaient
trouvé une valeur de ce coefficient entre 1.22 et 1.61.
L'étude par la méthode des perturbation est donc tout
à fait conforme aux anciennes études, elle confirme
qu'une méthode pseudo-statique conventionnelle ne prévoit
pas la rupture du talus du barrage.
Il est
particulièrement intéressant de calculer le coefficient
de sécurité en considérant la génération
des pressions interstitielles. En effet, il a été
montré grâce à de nombreuses observations qu'une
partie importante de sol au sein du talus du barrage a
liquéfié sous l'effet du chargement sismique. Un calcul a
été réalisé en utilisant la courbe de la figure
2b pour prévoir le développement des pressions
interstitielles et avec un nombre de cycles équivalents de 25
correspondant à un séisme de magnitude 6.6. Le
coefficient de sécurité F est égal à 0.88.
Cette valeur corrobore le résultat de l'analyse dynamique
puisque le coefficient de sécurité obtenu est égal
à 0.80.
Un autre calcul
considérant l'effet de fatigue du sol donne une valeur de 0.86
pour ce coefficient. Le nombre de cycles équivalent et
l'accélération maximum valent respectivement 25 et
0.6g.
Méthode
conventionnelle
F=1.40
Génération des pressions
interstitielles F=0.88
25
cycles, amax=0.6g
Effet de fatigue , 25
cycles
F=0.86
Effet de site, K=0.15 à la
base
F=1.09
Résultats
pour San Fernando
En conclusion, on
peut dire que l’introduction des effets du séisme dans
un code de calcul à la rupture conduit à des
résultats satisfaisants. Celui prenant en compte la
génération des pressions interstitielles est le plus
intéressant car la liquéfaction du sol s'est
avéré être la cause de la rupture. Ce calcul ainsi
que celui prenant en compte l'effet de fatigue du sol fournissent
une valeur similaire du coefficient de sécurité qui est
très proche du coefficient de sécurité de 0.80
calculé avec une méthode dynamique beaucoup plus
complexe.
Le calcul
considérant l'amplification de l'accélération en
tête de talus semble ne pas présenter beaucoup
d'intérêt puisque on a vu qu'il n'y avait pas eu
d'amplification significative entre le rocher et le sommet du
barrage. Cependant avec 0.15g à la base du séisme et avec
l'effet de site le coefficient de sécurité est 1.09 sur
la moyenne des profils testés. Comme il est de pratique
courante de considérer un coefficient de sécurité
inférieur à 1.1 comme le signe d'un glissement de terrain
potentiel, ces calculs, s'ils avaient été effectués
alors, n'auraient pas manqué d'alerter les concepteurs du
barrage.