5. Le chantier
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Excavation de la tranchée de Culebra (d'après de Nansuty, 1888)
La Commission d'études (1889) décrit le terrain comme étant constitué "de couches argileuses diverses, d'une consistance variable, qui ont déjà donné lieu à des éboulements inquiétants pour la continuation de l'œuvre". Elle trouve des causes multiples à l'origine de ces éboulements dont "la nature argileuse du terrain, la disposition des couches, des attaques prématurées au pied du talus, et, en outre, [le fait qu'] on ait aggravé la situation en chargeant, par des dépôts, les flancs du cerro en ne prenant aucune précaution, même élémentaire, en vue de l'écoulement des eaux". Par conséquent la Commission  conçoit "que des mouvements importants se soient produits, dès l'origine des travaux, dans ces argiles amollies par les eaux d'infiltration, reposant sur des couches déclives, chargées du poids de remblais et manquant, à leur base, de leur point d'appui naturel"
En préconisant la solution d'un canal à écluses ( 8 écluses en tout sur l'ensemble du tracé), la Commission réduisit la profondeur de la tranchée en portant le plafond du bief de partage à la cote +25,5 et modifia légèrement le profil de la CuCi sur une longueur de 1800 m dans la "Grande tranchée". Du fait que les mouvements observés affectaient essentiellement les couches argileuses de couverture sur une épaisseur d'environ 20 m, les talus y étaient réglés avec des pentes variant de 26°6 (talus 2/1) à 33°7 (3/2) au lieu de 45°. "A la limite de séparation des terrains en mouvement et des terrains en place", on aménageait une banquette de 11 m de largeur pour retenir les éventuels éboulements. Plus profondément, on adoptait une inclinaison moyenne des talus de 45°. Les banquettes nécessaires pour la réalisation d'une telle géométrie étaient disposées asymétriquement selon les sections avec des largeurs de 5 m sur le versant est – pour y poser des voies Decauville pour l'évacuation des déblais -  et de 3 m sur le versant ouest. Des caniveaux y étaient agencés de façon à recevoir et à évacuer vers la cuvette du canal les eaux de ruissellement. Enfin, le nouveau profil transversal devait être complété par des bermes de 2 m de largeur de façon à étaler les talus "par zones d'une quinzaine de mètres de hauteur verticale". La Commission modifia aussi la conception de la cuvette du canal en adoucissant les pentes de 78°1 à 45° tout en maintenant une largeur de 22 m au plafond. Dans cette hypothèse, les terrassements de la "grande tranchée" devaient atteindre un volume d'environ  20 ×106 m³  (R.G., 1890).
Le projet de la Commission d'études soulevant de nombreux doutes et bien des  discussions quant à l'alimentation en eau des écluses, le Comité technique, nommé par la Compagnie nouvelle en 1894 décida d'adopter un autre projet de canal à 8 écluses -  projet dit de la Tournerie - en modifiant, en ce qui concerne les terrassements, la section de la cunette navigable. Le plafond de celle-ci, implanté au niveau +20,75, était porté à 36 m de largeur et le tirant d'eau à 9 m de profondeur. Les talus sont raidis dans la cunette de navigation (63°4) et dans les couches de marnes et de schistes (68°2) en gardant, partout ailleurs, la pente à 45°. Dans la première épure, des bermes de 5 m de largeur étaient  aménagées par paliers de 10 m de hauteur mais, sur proposition de Dumas (CnCP, 1899), on réduisit la hauteur des paliers à 8 m pour tenir compte de l'écartement entre deux passes successives d'excavation (fig. 4.4). Cette solution impliquait un volume de terrassements au bief de partage de 23,85 ×106 m³ (Dumas, 1900)